Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 35.djvu/838

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

devant une humble croix au nom presque effacé. Oh ! quelle poésie sereine et douloureuse dans ces tombes sans nombre dont chaque petite croix blanche marque le sol où dort un pauvre enfant de France, qui partit pour la guerre avec l’espoir au cœur, et que nul ne reverra plus !

Tout le long de l’immense front semé de ruines, où les maisons ne sont plus que des monceaux de pierres, où les villes ne sont plus que d’informes débris croulans, où les arbres déchiquetés n’ont plus ni branches ni feuillages, où la terre elle-même est comme assassinée, tout renaîtra quelque jour, — et quand la paix sera depuis quelques années descendue sur le monde, quand les maisons se seront relevées, quand les églises enverront de nouveau dans la campagne qu’ébranle aujourd’hui le bruit du canon, le doux son de leurs cloches ressuscitées, quand la nature toujours renaissante aura de nouveau recouvert la terre de sa verdure et de ses fleurs, les traces de la guerre disparaîtront aux yeux des hommes. Il n’en restera que le souvenir éternel ! Mais il en restera aussi, de loin en loin, couchés au flanc de la colline sous la lumière du soleil, ou perdus quelque part dans l’ombre du vallon solitaire, tous ces champs de repos, tous ces cimetières sacrés, où nul n’osera troubler le sommeil des soldats de la Grande Guerre, et où les fils de ceux qui sont morts pour la France viendront pendant longtemps encore jeter des palmes et des fleurs.


Si l’ambulance est le lien funèbre où meurent bien des grands blessés que la chirurgie ne put pas guérir, elle est aussi l’endroit bienfaisant où le plus grand nombre d’entre eux trouveront les soins qui assureront leur salut.

C’est en effet des premiers soins donnés à l’ambulance que, pour le plus grand nombre des blessés, pour tous les blessés graves, pourrait-on dire, dépend la guérison ou la mort, et le rôle du chirurgien d’une ambulance active est véritablement grand.

La plupart des accidens graves sont dus presque exclusivement à l’infection des plaies. C’est donc par leur désinfection première et définitive que les blessés seront mis à l’abri de ces complications terribles, gangrènes gazeuses, phlegmons toxiques ou suppurations prolongées qui, lorsqu’elles ne les tuent pas, provoquent trop souvent le sacrifice d’un membre ou d’irréparables