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valeur de la méthode de Lister. C’est lui qui l’introduisit parmi nous, et c’est là un titre de gloire qui ne sera jamais prescrit.

Mais le dernier terme auquel devaient conduire, dans la pratique chirurgicale, les découvertes pastoriennes, est la méthode qui consiste à supprimer les causes d’infection au lieu de les combattre. C’est la méthode aseptique. Ce sera l’éternel honneur de Terrier d’en avoir peu à peu démontré la supériorité. C’est à ce Français, qui hier encore était parmi nous, que nous devons, dans la pratique de la chirurgie, la vérité définitive. Pasteur, Lister, Championnière, Terrier, voilà les quatre grands noms qui dominent l’histoire de la révolution chirurgicale contemporaine. Ce sont des fils de la France et de l’Angleterre qui ont, par la puissance de leur génie et le persistant effort de leur foi dans la vérité, répandu sur l’humanité tout entière les bienfaits incalculables de la chirurgie régénérée.

Les Allemands n’ont pris aucune part à cette révolution magnifique. Ils n’ont eu que l’ingéniosité d’exploiter ce que leurs ennemis d’aujourd’hui, ce que leurs vainqueurs de demain ont eu le génie de découvrir.


Ce sont précisément les miracles auxquels nous a, depuis trente ans, accoutumés la chirurgie qui nous ont fait perdre de vue ce qui devait arriver lorsque les conditions où elle s’exerce habituellement ne seraient plus remplies.

La plupart d’entre nous n’avaient jamais vu ni la septicémie gazeuse, ni l’infection purulente, et de longues années se passaient souvent sans qu’on pût observer un cas de tétanos. Il nous semblait que les terribles complications qui faisaient le désespoir de la période prélistérienne avaient pour toujours disparu et qu’elles ne pourraient pas revenir, même en cas de guerre. Nous pensions, un peu ingénument, qu’il serait en tout cas facile d’en triompher, — et nous faisions de doux rêves sur l’innocuité des blessures par balles aseptiques, que les hautes températures auxquelles elles sont portées débarrassent effectivement de tout germe, et qui, lorsqu’elles sont tirées d’un peu loin et ne sont pas animées d’une trop grande vitesse, font très souvent, en effet, des blessures non infectées et qui guérissent en quelques jours avec la plus grande simplicité.

Des mesures, d’ailleurs excellentes, avaient été prises