Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 35.djvu/789

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


XIV. — LA MOISSON FUTURE

Vaux est perdu momentanément, mais Vaux sera repris et la bataille de Verdun se gagne jour à jour. La bataille de Verdun, jour après jour, prend son sens. Le fantassin, qui ne connaît que ses camarades de tranchée, fait partie d’une immense armée répartie sur tous les fronts : sa sueur et son sang se mêleront dans l’histoire au sang et à la sueur de ses frères inconnus et lointains. Un coin de sol disputé, qui est considéré comme un but unique dans l’espace, n’est, en réalité, qu’un point du vaste front mouvant où se heurtent les deux forces du monde.

Cinq jours après la prise du fort, le 12 juin, le général en chef porte à la connaissance des troupes de Verdun les victoires russes en Bukovine et en Galicie dans cet ordre du jour :

LE PLAN MURI PAR LES CONSEILS DE LA COALITION EST MAINTENANT EN PLEINE EXECUTION.

SOLDATS DE VERDUN C’EST A VOTRE HEROIQUE RESISTANCE QU’ON LE DOIT. C’EST ELLE QUI A ETE LA CONDITION INDISPENSABLE, C’EST ELLE QUI A CRÉÉ SUR l’ENSEMBLE DU THÉÂTRE DE LA GUERRE EUROPÉENNE UNE SITUATION DONT SORTIRA DEMAIN LE TRIOMPHE DÉFINITIF DE NOTRE CAUSE.


Maintenant l’ennemi contenu subira notre loi et notre manœuvre.

Le 9 et le 10 mars, l’ennemi gravit les pentes Nord du fort de Vaux. Il n’est plus qu’à deux ou trois cents mètres de la contrescarpe. Pour franchir ces deux ou trois cents mètres, il emploiera trois mois. Trois mois d’efforts surhumains, d’attaques incessantes, de dépense inimaginable de munitions, d’invraisemblables pertes de jeunes hommes, fleur de la nation. Trois mois, comme s’il n’avait que cela à faire !

Et, pendant ces trois mois, la coalition, tranquillement, achève d’élaborer, préparer et exécuter son plan. Verdun est son bouclier.

On se bat devant le fort, dessus et dedans, du 2 au 7 juin. Et le 4, la première offensive russe au Sud du Pripet se