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composée du 2e régiment de zouaves et du régiment colonial du Maroc, a reçu la plus belle mission que puisse envier une troupe française : celle d’aller au secours de compagnons d’armes qui font vaillamment leur devoir dans des circonstances tragiques.

«Choisis dans l’héroïque armée de Verdun parmi les plus dignes de la grandeur de cette mission, le 2e zouaves et le régiment colonial du Maroc, soutenus par une puissante artillerie, animés de la volonté inébranlable d’aller jusqu’au bout de leur tâche, aborderont l’ennemi avec leur magnifique élan accoutumé et ajouteront de nouveaux lauriers à ceux qui couvrent déjà leurs drapeaux,

« Le pays saura leur prouver sa reconnaissance.

« Bonne chance, camarades, et vive la France !

« R. NIVELLE. »


Le 8 juin au petit jour, les zouaves et l’infanterie coloniale abordent en effet l’ennemi avec leur magnifique élan accoutumé. Cependant, l’espoir de secourir les défenseurs de Vaux est bien précaire. Bien des signes indiquent en effet qu’il est trop tard. Les observatoires ont remarqué des modifications dans l’aspect des voûtes : devant les salles 7 et 8, le pare-éclats en sacs à terre ou en pierre est presque complètement détruit.

Sous une tempête de feu, — car l’ennemi entend garder sa conquête, — nos fantassins progressent. Ils veulent aller jusqu’aux camarades. Ils iront.

Un obus pénètre dans un poste de commandement. L’appareil reste intact, mais le téléphoniste a les deux mains coupées par un éclat. Il tend ses moignons à son chef et s’excuse :

— Je ne peux plus téléphoner.

Comme l’attaque du 6 juin, l’attaque de la brigade mixte parvient à entourer le fort. Mais l’ennemi occupe la superstructure et ses mitrailleuses nous occasionnent de lourdes pertes. Des renforts lui arrivent sans cesse. Les chefs de l’expédition tombent l’un après l’autre, et parmi eux le commandant Gilbert et le commandant Henri Jérôme de Mouy, officier breveté de cavalerie qui, revenu du Maroc et affecté à un état-major d’armée, avait demandé à commander un bataillon de zouaves.

Une explosion, tout à coup, se produit dans le fort, et une épaisse fumée noire sort de la casemate 5.

Aucun être humain n’est plus vivant dans ce réduit.