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ce qui s’agite autour d’eux, des militaires aussi, mais d’autres, les créatures de l’ancien État-major, des Dousmanis, des Metaxas, les correspondans de l’Académie de Guerre de Berlin. À Salonique, il y a un Comité patriotique révolutionnaire qui s’agite, s’affiche et affiche, publie des proclamations, procède à des enrôlemens, nomme des chefs, défend contre l’étranger le territoire national, fait fonction et figure de gouvernement. À Athènes, il y a un gouvernement qualifié de ce titre, qui souffre et peut-être approuve, que des officiers livrent à l’étranger, — pour ne pas dire à l’ennemi, — ses forteresses, ses canons, ses fusils, ses munitions, ses provisions, et jusqu’à ses soldats, transportés ou déportés loin du danger et du devoir, plus loin encore de l’honneur, au fond de l’Allemagne. Où est le colonel Hadjopoulos ? Est-il allé habiter le logement que la reconnaissance prussienne lui préparait dans une petite ville, triste et glacée, de Silésie ? Est-ce tout le IVe corps d’armée, ou seulement la 5e division, est-ce 25 000 hommes ou 6 000 seulement, à qui il a ordonné de déserter ? Le gouvernement d’Athènes les a-t-il réclamés, et l’Empereur, s’il les tient, va-t-il les rendre à son beau-frère, certain qu’il n’en sera pas fait mauvais usage ? Cependant, tandis qu’avec armes et bagages, le colonel Hadjopoulos passait la frontière bulgare et, ajoute-t-on, plusieurs autres, un héros des guerres balkaniques, indigné des besognes qu’on lui proposait, honteux de voir accueillir en libérateurs dans la Macédoine grecque ces mêmes bandits qui, trois années auparavant, l’avaient couverte de deuils et de ruines, pleurant de colère et saignant par toutes ses blessures profanées, le colonel Christodoulos, entraînait, lui aussi, ses régimens, et les menait de Sérès à Cavalla, puis à Thasos, non pour capituler, mais pour combattre. Et maintenant, de partout, à l’appel des Christodoulos et des Zymbrakakis, des volontaires se lèvent, qui sentent que la Grèce n’a plus rien à perdre et qu’elle a beaucoup à réparer. Mais pour qui et pour quoi se lèvent-ils ? Cette semaine, le roi Constantin, dans une harangue à l’antique, exaltait la discipline, félicitait les uns, stigmatisait les autres. La discipline ? L’aveu serait grave, si le colonel Hadjopoulos était donné publiquement en exemple. Et quant au colonel Christodoulos, s’il était par là condamné, sans doute, au point de vue de la stricte discipline militaire, sa révolte fut un acte incorrect, mais dont la faute devant l’éternelle justice retombe en premier lieu sur ceux qui l’ont placé dans le cas douloureux de la commettre. En effet, lorsque ceux qui légalement commandent mettent leurs subordonnés dans l’obligation morale de désobéir, et lorsque ceux