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parole, car il n’a pas de favorite son. « Alaska, » et l’Alaska laisse également passer son tour. « Arizona, » et, suivant un arrangement préalable entre les deux Etats, l’Arizona cède son rang à New-York. Mais New-York, riche en hommes, a deux candidats, pour lesquels, concurremment, le gouverneur de New-York, Whitman, s’avance, tandis que le président Butler, de l’université Columbia, se dresse également. Mais le mouvement du gouverneur avait été plus rapide. Il est sur l’estrade. D’une voix aiguë, monotone et mal assurée, il lit les petites notes qu’il tient à la main : « Nous sommes ici pour demander que le président de la minorité fasse place à un homme qui représente la souveraine volonté d’un grand peuple. » Répondant à l’insinuation de Roosevelt contre Hughes : « Notre parti, dit-il, est riche en hommes imbus du véritable esprit de l’américanisme. Nul d’entre eux ne peut réclamer une prépondérance de l’esprit américain dans son cœur. En 1908, le parti républicain s’est trouvé uni pour porter à la présidence un éminent homme d’Etat et magistrat, William Howard Taft. Dans la campagne qui assura au candidat républicain la présidence, un homme se distingua particulièrement ; il était alors gouverneur de New-York. C’était le juge Charles Evans Hughes. Nous voyons en lui l’homme de l’action, le champion du peuple, le fidèle serviteur de l’Etat, l’esprit profond qui a médité sur tous les grands problèmes qui intéressent la nation... Plus que tout autre, il peut rendre au parti la confiance du peuple. Plus que tout autre, il peut rendre au pays la prospérité, le bonheur et la paix dans l’honneur. Je ne parle pas pour un homme ou un candidat. Le grand Etat de New-York, par la bouche de son gouverneur, offre au parti et à la nation le plus noble et le meilleur de ses fils. Je recommande comme candidat républicain pour la présidence des États-Unis Charles Evans Hughes. »

Pendant ce discours, les applaudissemens avaient été fréquens, parfois même plus fréquens que ne l’eût souhaité l’orateur. La mention incidente de cet autre magistrat, l’ex-président Taft, détourne à son profit l’attention de l’assemblée. Des délégués se dressent sur leur siège, agitent des chapeaux, poussent de longs cris. Même, un homme à longs cheveux entame subitement une sorte de gigue frénétique, ponctuée de cris sauvages. Sur l’estrade, l’orateur en reste interdit. Après cinq longues minutes d’attente, il fait un dernier effort pour