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ennemie. Le bataillon Bouin est alerté, et l’une de ses compagnies (la 11e, capitaine Hutinet) rapprochée pour contre-attaquer immédiatement. La 4e compagnie (capitaine Cadet), qui a été détachée du bataillon de Damloup pour tenir la batterie, garnit la tranchée de Saales qui les relie afin de s’opposer à toute sortie des Allemands s’ils essaient de déboucher du village. Enfin des renforts sont réclamés à la brigade, qui met à la disposition du secteur le bataillon Pélissier, du 52e régiment.

Des coureurs qui ont pu s’échapper de Damloup viennent confirmer la nouvelle apportée par le sergent. A la faveur des épaisses et mortelles vapeurs produites par les obus asphyxians et qui stagnent dans le fond de la Horgne et de la Gayette, l’ennemi a pu pénétrer dans le village. Les guetteurs intoxiqués ou surpris ont insuffisamment donné l’alarme. On s’est battu dans les caves et dans les maisons, sous les jets des flammenwerfer et des grenades : défense difficile et tardive qui n’a pas sauvé Damloup. Et l’ennemi va certainement tenter d’avancer sur le promontoire.

La compagnie Hutinet le prévient. Il lui a fallu peu de temps pour gagner l’abri de combat et, par le boyau de la Bruche qui suit la jetée au bout de laquelle se trouve le village, marcher sur Damloup. Bien peu de temps, et comme cette troupe s’en vient hardiment à la rescousse, officiers et sous-officiers en tête ! Bien peu de temps et l’ennemi a déjà organisé sa conquête.

Un officier de la compagnie qui est préposé à la défense de la batterie de Damloup, le sous-lieutenant Brieu, a suivi le combat et donne ces détails : « Nous voyons nos camarades partir tête baissée en bondissant de trou d’obus en trou d’obus. Mais les Allemands ont amené des mitrailleuses qui fauchent nos pauvres poilus, et leurs tirs de barrage achèvent de briser la contre-attaque. En quelques instans, la pauvre 11e est démolie et l’on nous ramène le capitaine Hutinet et deux sous-lieutenans grièvement blessés. Le restant de cette compagnie lutte encore, mais son effectif est des plus réduits et les débris viennent se réfugier près de nous. A ce moment, le colonel Tahon, mis au courant, nous donne l’ordre de tenir à tout prix la batterie et d’empêcher les Boches d’avancer. Le capitaine Cadet organise la position avec la 4e et les restans de la 11e ainsi qu’avec une section de mitrailleuses. Nous nous mettons au travail avec activité, car nous sentons que les Allemands vont