Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 35.djvu/512

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tenant sur la première ligne pour y assurer la direction du combat, dans un terrain difficile et couvert, jusqu’à ce qu’une trop grande perte de sang l’obligeât à se retirer. » A Crouy, le 14 septembre, une balle de mitrailleuse lui a labouré la poitrine du côté gauche. Chevalier de la Légion d’honneur du 11 juillet 1900, il est promu officier le 11 janvier 1916 avec ce libellé : « Officier supérieur de haute valeur morale et militaire. Blessé grièvement le 14 septembre 1914, est revenu au front où il n’a cessé de rendre les meilleurs services ; blessé à nouveau très grièvement le 3 octobre 1915, alors qu’il procédait avec sang-froid et méthode à la reconnaissance du secteur de son bataillon. » Il a reçu à Tahure, en Champagne, sa seconde blessure : un éclat d’obus à l’abdomen lui a brisé la crête de l’os iliaque avant de ressortir par le dos. Trop mal remis encore pour pouvoir assumer un commandement actif, il a demandé un poste où il y eût peu à bouger et beaucoup à risquer. « Vous commanderez un fort de Verdun. (Le commandant fait la grimace : il préfère le terrain découvert.) — Le fort le plus exposé. — Lequel ? — Vaux évidemment. — Alors, va pour Vaux. « Et le voilà parti. Tel est l’homme à qui sont confiées les destinées du fort.

Sa troupe se compose d’une compagnie du 142e régiment, la 6e sous les ordres du lieutenant Alirol, d’une compagnie de mitrailleurs du 142e (lieutenant Bazy), d’une trentaine d’artilleurs, d’une dizaine de soldats du génie, d’une vingtaine d’infirmiers, brancardiers et téléphonistes, d’une vingtaine de territoriaux pour les corvées. Au total, de 250 à 300 hommes. Mais c’est là le chiffre normal, réglementaire de la garnison. Tout de suite il s’augmentera d’une cinquantaine de mitrailleurs du 53e régiment, puis des blessés qu’on apportera au poste de secours, puis des élémens du 101e et du 142e régimens qui, protégeant le fort en avant et sur les flancs, reflueront à l’intérieur par les ouvertures des coffres sous la poussée ennemie. Dès le 2 juin, il s’enflera et, de 350, s’élèvera bientôt à plus de 600, ce qui aggravera les difficultés déjà si grandes de la défense. En effet, si les ravitaillemens en munitions, génie, service de santé, sont largement suffisans, les approvisionnemens en vivres ont été prévus pour une durée de quinze jours, mais pour une garnison de 250 hommes. Les citernes ont bien été remplies, mais les troupes du secteur qui l’ont su n’ont pas