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relèvement de notre natalité nous permettra de nous passer d’eux. D’ailleurs, les conditions du travail seront certainement différentes de ce qu’elles étaient avant la guerre. On se préoccupe, dès maintenant, d’élaborer, pour les travailleurs de la nation alliée, un statut nouveau, qui les mettra sur le pied d’égalité avec les nôtres. De plus, si ce projet de « droit latin, » dont il était question tout à l’heure, réussissait à prendre forme, ils ne seraient plus, en France, des étrangers, mais des Français du second degré.

Cette immigration, intensive au début, en tout cas méthodique, pourra être très profitable pour les deux pays, si elle est bien comprise et bien réglée. Même livrée à peu près au hasard, elle a donné, en Algérie, de fort bons résultats, que, pour ma part, je n’ai cessé de vanter. On m’a reproché de l’avoir louée en Afrique, et, dans mon roman l’Invasion, de l’avoir critiquée à Marseille et sur le littoral de Provence. Rien de plus compréhensible cependant, si l’on songe que, jusqu’à ces derniers temps, l’Italie fut l’alliée officielle de nos ennemis. Cette alliance lointaine était beaucoup moins dangereuse pour nous, dans cette Algérie où tous les Européens, quels qu’ils soient, forment un bloc de résistance contre l’indigène, que dans une ville ou dans une province française, où le danger de l’agression est plus proche, où l’étranger garde intactes toutes ses attaches nationales. Ensuite, je n’ai fait une peinture un peu sévère que des déchets de l’immigration, des mauvais sujets italiens, qui achevaient de se gâter chez nous au contact de nos pires élémens révolutionnaires. Il faudrait que la Métropole continuât à encadrer même les bons sujets qu’elle nous envoie ; que, grâce à des émissaires spéciaux, elle se préoccupât d’entretenir leur éducation civique, morale, ou religieuse. Les catholiques n’ont pas attendu les événemens actuels pour s’en aviser. Il y a longtemps déjà, Mgr Bonomelli, évêque de Crémone, avait fondé une ligue pour l’assistance matérielle et morale des ouvriers italiens à l’étranger. Il suffirait d’élargir cette ligue pour lui permettre de fonctionner au mieux de notre intérêt, comme de celui de nos hôtes.

Ce qu’il y a de sûr, c’est que le peuple italien est resté très prolifique. Une nation qui a beaucoup d’enfans peut se rire de tous les revers et de toutes les décadences politiques : elle est certaine de ressusciter un jour. Mais il y a plus : ouvriers