Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 35.djvu/273

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des grappes de soldats ivres de la Garde et corps voisins victimes du Champagne.

Cependant, le 19e corps, détaché de l’armée d’Espérey pour appuyer la résistance de Foch, avait repris, dès le 9 au soir, sa marche victorieuse : on le voyait à Vauchamps, Baye, Champaubert, et c’est à bon droit que le général d’Espérey pouvait féliciter ses troupes en un ordre enflammé, où il évoquait « les champs mémorables, » où nos ancêtres avaient battu les soldats de Blücher et où les soldats de la Troisième République venaient de faire reculer « les troupes les plus redoutables de la vieille Prusse. » De Fère-Champenoise, en face des marais où s’étaient abimés, aux cris de « Vive l’Empereur ! » les vaillans petits Marie-Louise de Pachtod, le général Foch eût pu faire sien cet ordre où éclatait le plus légitime orgueil. Des collines où Marmont n’avait pu tenir, il venait, lui, de voir sombrer la Garde impériale prussienne et couler par tous les pores, en cette fuite de soudards ivres, l’honneur, avec le sang, de l’Allemagne.


Autant que le concours de la 5e armée, à sa gauche, celui de la 4e, à droite, avait aidé le général Foch à faire front à une situation un instant si difficile.

Pendant que Maunoury, sur l’Ourcq, faisait ventouse, que les armées Frenchet Espérey, menaçant Klück d’encerclement » contribuaient à sa déroute, que la droite d’Espérey concourait avec la vaillance de la 9e armée à faire échouer la formidable tentative de percement faite à notre centre, les deux armées de droite remplissaient leur mission : protéger le pivot en rejetant l’ennemi du triangle dont les sommets étaient Verdun, Bar et Vitry.

Les soldats de Langle de Cary et de Sarrail sont d’autant plus préparés — moralement — à gagner une bataille qu’ils s’y sont, en cours de retraite, entraînés par de fréquens succès. Mais, conséquence de cette victorieuse retraite, ils sont singulièrement fatigués. Un général disait : « Nous avons gagné la partie avec des hommes hallucinés de fatigue. » Pour ne citer qu’un cas, le 12e corps, avec lequel le général Roques a remporté, depuis quinze jours, maints succès, n’a plus guère que 6 bataillons en état de participer au début de l’action.

Le 5, la 4e armée a atteint la ligne Humbeauville-Maurupt.