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Château-Thierry, tandis que le 3e la passe à Montigny-le-Condé, le 1er accélérant sa marche à travers le plateau de Vauchamps et le 10e restant à la disposition du général Foch.


Ainsi French poussant les Allemands et Espérey les bousculant, les deux armées atteignaient, dépassaient la Marne. Klück était menacé maintenant directement sur son flanc, tandis que Maunoury, fortifié par de nouvelles troupes, continuait à lui tenir tête. On comprend que le commandant de la Ire armée allemande ait, ce 9 septembre, tenté un effort enragé pour venir à bout de son adversaire. Le sort de la bataille tient peut-être à ce moment.

Klück essaie tout à la fois de déborder Maunoury au Nord par Nanteuil, de l’enfoncer au Sud par Etrepilly.

De Betz, le IVe corps se jette sur Nanteuil : il se heurte à notre 4e corps, arrivé la veille sur le champ de bataille : choc violent, lutte opiniâtre, sanglante. Mais, en dépit de la vaillance des soldats du général Boëlle, les Allemands occupent Nanteuil en flammes ; notre gauche est très menacée. Instant tragique : partout ailleurs, l’effort allemand est brisé, car, quoique canonné à merci, Etrepilly tient bon ; mais Klück n’a-t-il pas trouvé à Nanteuil le défaut où enfoncer la dague et allons-nous in extremis être tournés ? Maunoury envoie à Boëlle l’ordre de ne plus faire un pas en arrière, mais, au contraire, de marcher en avant et « de se faire au besoin tuer sur place » : celui-ci n’a pas attendu cet ordre pour reformer son corps et faire face ; il se porte en avant, résolu à se faire hacher. Et il se trouve en face du vide. Klück battait en retraite.

C’est que les avis de Marwitz étaient devenus pressans : « Il ne pouvait plus résister aux attaques combinées des Anglo-Français ; » French et Espérey pouvaient avant quelques heures le rejeter sur Klück, pour qui la situation devenait si dangereuse que de longues hésitations ne lui étaient plus permises.

« Le cœur lourd, » dit une relation allemande, il lança l’ordre de retraite générale vers le Nord. Il avait, avec des milliers de ses soldats, perdu la partie et c’était pour éviter un désastre effroyable — imminent — que le plus habile stratège