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C’est en effet, de l’Ouest à l’Est, tout d’abord la riante Ile-de-France où se livrera la bataille de l’Ourcq ; la Marne jusqu’au confluent de l’Ourcq aux eaux abondantes, l’Ourcq de Lizy à la Ferté-Milon, les lisières Sud des forêts de Villers-Cotterets et de Chantilly circonscrivent ce premier champ de bataille, dominé en partie par ce plateau du Multien où Klück établira un instant ses batteries lourdes : terre encadrée de forêts, coupée de parcs encore verdoyans après ce chaud mois d’août ; Meaux en forme la limite vers l’Est. A l’Est de l’Ourcq, commence la Brie, d’abord opulente, ensuite plus pauvre, vaste plateau triangulaire à peu près circonscrit par les vallées de la Marne, du Petit-Morin et de la Seine ; c’est la région de Coulommiers, la Ferté-sous-Jouarre, Montmirail, Saint-Prix. C’était autrefois une vaste forêt ; le sol reste boisé ; il est coupé d’éminences, d’où ce préfixe de mont si fréquent : car si Coulommiers est dans un fond, le vaste plateau qui domine la ville au Sud envoie des promontoires, qui ont toujours passé pour d’excellentes positions stratégiques. Du temps où les seigneurs y bâtissaient des fertés à celui où Napoléon mettait toute son énergie à les enlever, on s’est toujours disputé ces éminences. De ces hauteurs et du plateau, Montmirail, Vauchamps, Champaubert, Saint-Prix, Mondement dominent la dépression, longue de quatre lieues, des marais de Saint-Gond, au Nord desquels s’étend la forêt d’Epernay : terre historique déjà rougie du sang français et plus encore de celui des Allemands, quand l’Empereur courant de la Seine à la Marne remportait, sur les ennemis en marche vers Paris, ces mémorables victoires que, cent ans après, vont si glorieusement commémorer les soldats d’Espérey et de Foch.

A l’Est s’étend, sur les deux rives de la Marne, la crayeuse Champagne, plus blanche que jamais sous l’impitoyable soleil de cette fin d’été : sous la poussière qui aveugle, les bois de pins et de sapins qui seuls rompent la monotonie de la plaine paraissent gris ; c’est sous cette poussière que la droite de Foch et l’armée de Langle de Cary se battront. A Vitry qui sera le centre d’une si vive action, la Saulx, grossie depuis peu de l’Ornain, se jette dans la Marne. Saulx et Ornain dessinent des vallées plus verdoyantes, encore que ternies par la poussière blanche et qu’égayaient de rians villages ou bourgs, — demain champs de ruines et de mort ; — de Blesmes à Revigny, ces vallées amènent au Barrois : celui-ci s’étend de Ligny à Saint-Mihiel :