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que par un ciel ensoleillé, car, dans le premier cas, le « gradient » est, les observations thermométriques le prouvent, moindre que dans le premier.

Tout cela nous aide à comprendre, au moins en partie, pourquoi, ainsi que les physiciens l’ont constaté, l’air paraît d’autant plus transparent au son qu’il est plus homogène.


Les canonnades de la présente guerre ont permis d’obtenir des données intéressantes et nouvelles sur un phénomène qui avait déjà été observé antérieurement, mais beaucoup plus imparfaitement, et qu’on appelle les zones de silence.

A diverses reprises, lors notamment d’éruptions volcaniques au Japon ou de déflagrations accidentelles de grosses quantités d’explosifs (par exemple lors de l’explosion de 25 000 kilogrammes de dynamite du chemin de fer de la Yungfrau en 1908, et lors de l’explosion de poudre de Wiener-Neustadt en 1912), on avait constaté que l’explosion avait été entendue partout dans un certain rayon autour du centre sonore, puis également en un assez grand nombre de points situés beaucoup plus loin. Mais entre ces deux séries de stations d’audition s’étendait une large bande de territoire à peu près concentrique au centre d’explosion, large de plusieurs dizaines de kilomètres au moins, et dans laquelle on n’avait entendu le bruit que très faiblement ou pas du tout. On avait pu délimiter sur les cartes la forme, d’ailleurs assez irrégulière et variable d’un cas à l’autre, de ces zones de silence, et des sa vans, en particulier des japonais, avaient publié sur ces curieux phénomènes des recherches fort intéressantes.

Le docteur van Everdingen d’Utrecht a repris l’étude systématique de ce phénomène, notamment à l’occasion du bombardement d’Anvers par les Allemands, et les observations qu’il a réunies mettent à nouveau nettement en évidence l’existence d’une zone de silence au delà de laquelle on recommençait à entendre très nettement le canon et qui s’étend environ entre 100 et 150 kilomètres de distance autour- d’Anvers. Au delà du 160e kilomètre, l’audition du canon (je devrais, dire l’ « audibilité, » s’il n’était pas admis qu’une expression mal nuancée vaut mieux qu’un néologisme) s’est trouvée nettement augmentée.

Ce phénomène bizarre est d’autant plus digne d’intérêt qu’il a sans doute joué un grand rôle dans l’histoire et que les stratèges de l’avenir auront avantage à le connaître, s’ils veulent éviter de funestes erreurs.