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les personnes de bonne volonté, étant donné le préjudice que ne manquerait pas d’apporter aux ouvrières la concurrence du travail non rétribué des femmes.

Le patriotisme uni à la charité chrétienne revêt les formes les plus diverses ; mais il n’en est pas de plus séduisante que celle qu’a donnée à son œuvre un important groupe de jeunes filles qui s’intitulent « Noëlistes [1], » œuvre qu’elles ont fondée, su mettre sur pied et qu’elles soutiennent avec une inlassable persévérance. Se considérant comme les membres d’une grande famille, inspirées peut-être pas le nom qu’elles ont pris et en souvenir du divin Enfant « enveloppé de langes, » elles se réunirent dès le début de la guerre pour confectionner des layettes aux enfans nouveau-nés des soldats partis au front. Au mois de mars 1915, environ 2 000 layettes avaient été distribuées soit par les groupemens, soit par des « Noëlistes » isolées, directement ou par l’intermédiaire du Noël.

Quelqu’un ayant dit assez inconsidérément :

— Après la guerre, alors que tant d’hommes auront disparu, que fera-t-on de l’excédent des femmes ?

L’une de ces jeunes filles répondit :

— Nous ne serons pas trop de mères pour les orphelins.

Aussi, ayant vêtu les tout petits, elles pensèrent qu’il fallait les aider à vivre et prévoir en quelque sorte leur avenir. Avec une ardeur juvénile, elles adressèrent un pressant appel qui fut entendu ; et c’est ainsi que naquit l’œuvre de l’ « Adoption familiale des Orphelins de la Guerre » qui secourt les orphelins de la guerre non dans les orphelinats ou autres institutions, mais dans leur propre famille ou chez les proches parens et, à défaut de ceux-ci, dans une famille particulièrement recommandable dans leur pays. On s’adresse de préférence aux familles de plus de trois enfans.

Le Noël compte 250 comités de jeunes filles en France (quelques autres sont en Belgique, en Suisse, en Italie, en Espagne, au Brésil et au Canada). La plupart de ces groupes acceptent d’avoir un ou plusieurs adoptés au nom du Comité. Les « Noëlistes » isolées sont adoptantes ou marraines, soit qu’elles offrent individuellement une pension annuelle de deux

  1. Le Noël est le nom d’une Revue pour la jeunesse dont elles sont les abonnées.