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les troupes firent-elles une grande partie de l’étape à pied et par moitié sur chaque rive. Approvisionnemens et hôpitaux empruntaient la voie fluviale. Les berges élevées dépassent le niveau du fleuve, même pendant ses crues normales. Des herbes rares, des broussailles sèches les couvrent sans pour cela fixer un sol sablonneux que le vent, dans ses tourmentes, soulève en colonnes épaisses.

Le 11 novembre, 4 bataillons et 1 500 cavaliers quittent Azizié ; le lendemain, toute l’expédition dépasse Kutunie et touche Zeur le même jour. Ce point aurait une importance particulière si, dans un tel pays, on pouvait combattre loin de l’eau : de là, en effet, part une belle route qui rejoint Bagdad à travers les sables et franchit un affinent du Tigre, la Dialah, sur un pont de bateaux.

Le 20 novembre, Laj était occupé ; et le 21, les troupes arrivaient en vue de Ctésiphon.


Ancienne capitale des Parthes sassanides, Ctésiphon, dès la plus haute antiquité, semble destinée à connaître la guerre. P)n 115, Trajan fait traîner sa flotte à bras d’hommes de l’Euphrate jusqu’au Tigre et s’en empare ; en 198, Sévère, qu’avait insulté Vologèse IV, marche sur la Mésopotamie, construit une escadre avec les bois des forêts bordant l’Euphrate et conquiert la ville, d’où il emmène 100 000 captifs. Moins d’un siècle plus tard, Septimius Odenath, chef de Palmyre, en chasse les Parthes et devient, ensuite, ami de Rome. Cent ans après, 18 000 Romains, avec Procope, mettent une armée en fuite, sous les murs de la cité. En 637, Ctésiphon devient arabe.

De cette antique et prestigieuse capitale, seul demeure un souvenir illustre rendu vivant par un gigantesque arc de triomphe[1]. Long de 91 mètres, haut de 35, encadrant une voûte de 26 mètres, il est construit en grandes briques, dont sont faites aussi tant d’autres ruines voisines. Mais les habitans ont diminué ces glorieux vestiges, emportant une partie des matériaux pour en édifier leurs maisons.

Nour-Eddin pacha y avait soigneusement préparé ses points d’appui, qui formaient deux lignes de tranchées étroites, sans

  1. D’après M. Dieulafoy.