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— En 1913, ces gens qui aiment bien à faire des comités et des manifestations avaient imaginé de célébrer le centenaire de la libération de 1813, qui vit partir les Français. Il y avait peu, très peu d’enthousiasme. Alors, pendant des semaines, le Comité a travaillé pour trouver de quoi justifier les joies de la libération ; on a fouillé les archives, on a fait des enquêtes sur tous les ennuis que les troupes françaises avaient bien pu causer à nos malheureuses populations... on n’a rien trouvé. Comme la fête était commandée, il a bien fallu célébrer quelque chose qu’on n’a pas précisé... Le parti socialiste avait décidé de ne pas participer à cette solennité approximative. Or, il faut vous dire que le parti socialiste s’abstient souvent... et, à chacune de ses abstentions, on crie toujours : » Ceux-là ne font rien comme les autres, ils ne manifestent pas avec la nation... » En 1913, on a dit : « Hé ! hé ! ils peuvent avoir bien du tact, ces socialistes... »

Dans les odorantes sapinières que traverse la route d’Utrecht à Arnhem se dresse une pyramide d’Austerlitz, élevée par les soldats de Marmont à la nouvelle de la victoire ; depuis le commencement de la guerre, chaque dimanche, les pèlerins y affluent, lisent les inscriptions, commentent les souvenirs. Il y a quelque part, dans un autre bois, une pyramide de Waterloo : les promeneurs passent, sans un mot.

Jamais une parole, un coup de plume ou de crayon n’ont seulement effleuré la France ; nos adversaires cherchent dans le silence la seule arme qui soit inoffensive pour eux-mêmes. Avec une certitude toute scientifique, la doctoresse Charlotte van Manen me déclare : « J’estime que, malgré l’Angleterre, il y a dans ce pays 92 pour 100 des nationaux qui pensent en faveur des Alliés : les 8 pour 100 qui pensent autrement sont de très vieilles personnes, généralement peu intelligentes... » Je n’ai pas eu l’indiscrétion de vérifier.

Pourtant, avons-nous été des amis suffisamment attentifs ? N’avons-nous pas trop docilement abandonné la Hollande à l’impérieuse propagande de nos adversaires ?

Et pourtant, les sympathies hollandaises se sont affirmées par maintes initiatives. L’hôpital néerlandais du Pré-Catelan, dont la création fut assurée par le dévouement du professeur Treub, voit à chaque nouvelle saison de souffrances ses donateurs renouveler leur généreux effort. A La Haye, à Amsterdam,