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expérience ; et, en outre, il put ainsi jeter un coup d’œil sur le domaine, bien peu exploré alors, des antiquités et des langues américaines. Cette aventure le détourna de l’enseignement secondaire : il n’eut pas à le regretter.

Un an auparavant, une rencontre plus ou moins fortuite l’avait mis en relations avec le grand égyptologue français Mariette, de passage à Paris. Celui-ci, informé de ses études et de son savoir précoce, avait voulu le mettre à l’épreuve, en lui faisant traduire deux textes récemment découverts, notamment la stèle dite du Songe, trouvée par lui-même et encore inédite. Le succès fut complet. La traduction du jeune normalien parut dans la Revue archéologique. Elle le classa parmi les égyptologues, entre lesquels son éducation universitaire devait lui assurer rapidement un rang d’honneur.


II

L’Ecole pratique des Hautes-Etudes venait d’être fondée en 1868 par Victor Duruy. Maspero, peu après son retour d’Amérique, y entra, en 1869, comme répétiteur de langue et d’archéologie égyptiennes. Quatre ans plus tard, en 1873, il présentait à la Faculté des lettres de Paris deux thèses qui lui valurent le titre de docteur ès lettres. Toutes deux, bien entendu, se rapportaient à ses études favorites : la thèse principale traitait du Genre épistolaire chez les anciens Égyptiens. C’était la première fois que l’égyptologie affrontait le jugement de la Faculté. Celle-ci n’eut qu’une courte hésitation. En accueillant la science nouvelle, elle lui reconnut droit de cité dans l’Université.

Cette science, qui avait dû, comme on le sait, son premier essor aux admirables découvertes de Champollion, avait pris pied avec lui au Collège de France dès 1831. Elle était française d’origine, elle recevait en France une investiture officielle. Bien que Letronne, qui occupa, de 1832 à 1848, la chaire laissée vacante par la mort prématurée de Champollion, ne fût pas à proprement parler un égyptologue, il rendit à l’égyptologie de réels services, en lui apportant le concours de sa grande érudition d’helléniste et de sa critique pénétrante. Il eut pour successeur Charles Lenormant, dont les connaissances archéologiques lui profitèrent aussi. Mais les progrès qu’elle avait faits pendant ce temps se manifestèrent surtout par l’enseignement