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I

Né à Paris, le 23 juin 1846, Gaston-Camille-Charles Maspero était, par sa famille, d’origine italienne. Peut-être dut-il à cette ascendance quelque chose des qualités que l’on attribue communément à nos voisins d’au-delà des Alpes, la finesse et la souplesse de l’intelligence. Mais ce qui semble avoir prédominé en lui de bonne heure, ce fut la curiosité sérieuse, associée à une remarquable volonté de travail. Il était doué, en outre, d’une rare faculté d’assimilation et d’une mémoire excellente. Il fit ses études comme interne au lycée Louis-le-Grand, de 1853 à 1865. Il se destinait à l’Ecole normale, et son goût très prononcé pour les études historiques pouvait faire pressentir de loin son orientation future. D’ailleurs, il ne négligeait rien et réussissait en tout. De bonne heure, il trouva sa voie. Lui-même aimait à rappeler plus tard comment sa vocation d’égyptologue s’était éveillée devant le simple spécimen d’écriture hiéroglyphique que donnait le Manuel d’Histoire ancienne de Duruy. Son esprit pénétrant et réfléchi, stimulé par un sens très vif de la réalité vivante, avait entrevu là autre chose qu’un objet de pure curiosité. Il se mit à fréquenter le musée égyptien du Louvre, il s’arrêta devant ces monumens et ces inscriptions auxquels la plupart des visiteurs n’accordent guère qu’un regard rapide en passant. Voulant absolument les comprendre, c’est-à-dire en somme se rendre compte de ce qu’avait été le peuple dont ils représentaient les idées et les croyances, les mœurs et les sentimens, il se procura, sur ses très modiques ressources, quelques mémoires des égyptologues les plus renommés alors, de Chabas, d’Emmanuel de Rougé. Il les étudia comme il savait étudier. En rhétorique, il déchiffrait déjà cette écriture dont le secret n’était encore connu que de bien peu d’adeptes. Cela ne l’empochait d’ailleurs aucunement de posséder autant de grec et de latin que n’importe qui d’entre ses condisciples. En 1865, à dix-neuf ans, il était reçu à l’Ecole normale dans la section des lettres.

Cette adolescence, austère et studieuse, l’avait mûri, sans lui faire perdre l’entrain ni la vaillante humeur de la vingtième année. Reçu licencié en 1866, il s’adonnait plus spécialement, dès sa seconde année d’Ecole, à l’histoire, en vue de