Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 34.djvu/437

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui avaient servi dans l’armée anglaise pendant la campagne du Transvaal. Tout était à créer, à organiser. Ce qui a été fait, dès le début de la guerre, tient du prodige.

Le Parlement était en vacances ; le premier ministre, M. Borden, voyageait dans l’Ouest. Il revint en hâte à Ottawa, rassembla les membres du Cabinet, convoqua la Chambre des Communes et le Sénat, et proposa la formation d’un corps expéditionnaire : la proposition fut votée à l’unanimité des voix. Il demandait 20 000 volontaires, il s’en présenta près du double. Et pour les recevoir, le ministre de la milice, M. Hughes, réalisa en quinze jours ce tour de force d’établir à Valcartier, non loin de Québec, un camp non seulement gigantesque, mais confortable, à la manière anglaise, avec conduites d’eau, éclairage électrique, appareils de désinfection, bains, douches, cuisines bien outillées et bien pourvues, etc.[1].

Pendant ce temps, les ateliers de Montréal tissaient des kilomètres de drap khaki, et d’innombrables tailleurs confectionnaient les uniformes.

En un clin d’œil, sous le commandement du lieutenant-général Alderson, la 1re division, — infanterie, cavalerie, artillerie lourde et légère, service de santé, train des équipages, — se trouva constituée. Le gouverneur, Son Altesse royale le duc de Connaught, put venir dès le mois de septembre la passer en revue. Le 3 octobre, elle s’embarquait avec armes et bagages. Toute une flotte de transports avait été rassemblée dans le Saint-Laurent ; ils descendirent le fleuve et s’acheminèrent vers Plymouth. Six croiseurs de Sa Majesté leur faisaient escorte, le Chargbdis, le Diana et l’Éclipse en tête, le Glory et le Suffolk sur les flancs, à l’arrière le Talbot. L’Union jack claquait au vent. Jamais l’Océan n’avait vu passer pareille Armada.

Il n’avait fallu que deux mois pour réunir et expédier 35 000 hommes.

Actuellement, il y en a 290 000 sous les drapeaux, et il y en aura bientôt 500 000 ; les crédits nécessaires ont été volés le 8 janvier dernier.

Or, il faut bien remarquer que, d’après le recensement de 1911, le Dominion ne compte que 7 200 000 habitans. Il faut remarquer en outre que la conscription y est et très

  1. Voyez le petit livre si documenté et si vivant de M. Max Aitken : Canada in Flanders, 1916.