Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 34.djvu/245

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
CHOSES D’ESPAGNE


I

Les fidèles de la science, de la philosophie et de l’art sont, en France, et de tous les Français, les moins familiers avec la politique. Ils lui sont devenus plus étrangers à mesure qu’elle-même s’est faite plus étrangère à l’étude, à la raison et à la beauté. Ce n’est pas à dire qu’ils se désintéressent de leur patrie. Leurs travaux mêmes les obligent à connaître la continuité, les renouvellemens, les richesses du génie national : envers lui leur compétence rend leur piété plus consciente, plus universelle, et si d’autres aiment autant la France, eux savent mieux ce qu’il en faut aimer.

La France n’ignore pas combien ils sont à elle et, à son tour, elle tient à adopter pour siens les principaux de ceux qui l’honorent par un effort où ils ne paraissent pas occupés d’elle. Dans leurs retraites elle les cherche ; de leur dispersion elle les rassemble en un corps de l’Etat ; elle a donné son nom à leur compagnie, l’Institut de France, et en attirant sous une seule et célèbre Coupole les supériorités qu’elle consacre, elle les encourage à servir d’un zèle commun l’intérêt public.

L’Institut de France n’a pas failli à cette mission. Depuis la guerre, les sollicitudes de son patriotisme furent multiples. Des manifestes collectifs ont associé sa voix à celle de la patrie, ses savans ont mis au service de la défense nationale leurs laboratoires, ses messagers volontaires ont porté aux pays où l’on hésite à nous être favorable les bonnes raisons de se décider. La dernière de ces collaborations était tentée en Espagne, il y a