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ainsi le rapport inverse, c’est-à-dire celui de la poussée à la traînée. On aurait évité par-là le résultat absurde auquel ils aboutissent, et qui leur fait dire qu’un avion, dont la finesse est égale à 0, 12 est plus fin, c’est-à-dire en bon français a une finesse plus grande que celui dont la finesse égale 0,14. On oublie un peu trop, parfois, dans le langage technique, d’écorcher le simple bon sens, et je prétends qu’il n’est pas nécessaire de creuser, hors de propos, des tranchées infranchissables entre le parler savant et celui de tout le monde. Il y a bien d’autres exemples, d’ailleurs, de cette curieuse manie, ne fût-ce que l’expression de « corps noir » que, suivant moutonnièrement l’exemple des savans allemands, nous avons appliquée au corps idéal, dont le pouvoir émissif est égal à l’unité. L’expérience prouve que les corps incandescens se rapprochent d’autant plus de ce « corps noir » qu’ils sont plus blancs, et c’est ainsi que nous avons été récemment amené à donner en toute rigueur la réponse suivante à quelqu’un qui nous demandait de définir la couleur blanche parfaite : « Le blanc est la couleur d’un corps noir de température infinie. » Je ne sais si cette définition ne sera pas pour les peintres un sujet d’étonnement, mais, comme physicien et en donnant aux mots leur sens convenu, je n’en saurais trouver de meilleure. Cet exemple montre, comme la « finesse » des avions, que le langage savant a parfois ses raisons que la raison ne connaît pas.

D’après ce que nous venons de voir, il est clair que la qualité d’un avion, sa capacité de voler et de transporter des charges, sa vitesse et sa sustentation dépendent avant tout des réactions produites sur lui par l’air, des composantes de la résistance qu’exerce celui-ci sur les diverses parties de l’appareil.

La mesure systématique des résistances aériennes sur les diverses surfaces utilisables en aviation était donc le premier et le plus fondamental des problèmes posés à l’aérotechnique. Nous allons voir maintenant, d’un coup d’œil rapide, et sans prétendre faire un exposé complet de la question, comment ce problème a été résolu.


Deux méthodes principales ont été et sont encore employées pour étudier les actions de l’air sur un objet en mouvement. Dans la première, on meut effectivement l’objet à étudier dans l’air immobile ; dans la seconde au contraire, l’objet restant fixe, on étudie sur lui l’action d’un courant d’air.

La première méthode (objet mobile dans l’air) tend à se rapprocher