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télégraphie sans fil de la théorie électromagnétique de Maxwell. Il est certain que les problèmes posés par les premiers hommes volans ont pris d’abord un peu au dépourvu les servans du calcul intégral. Il est certain que si des points importans du vol par le plus lourd que l’air avaient été traités par les théoriciens que nous avons cités, leurs travaux avaient passé inaperçus, ils n’avaient point eu l’honneur de la considération ou même de l’attention des académies. Je n’ai pas entendu dire que les Wright fussent même bacheliers, et si Ader est docteur ès sciences, ce qui est possible après tout, cela n’a pas suffi à lui assurer, lors de ses premières et magnifiques tentatives, les investitures officielles qu’il méritait. Comme le disait, il y a trois ans, le grand savant américain Graham Bell, il est certain que le progrès a été beaucoup plus sensible, d’abord dans l’art que dans la science de la locomotion aérienne.

Mais si, en des matières aussi complexes, la théorie seule est impuissante, ou incomplète, car toujours quelque circonstance existe qui glisse comme un fin poisson dans les mailles trop larges des équations, — on a vu des ponts, calculés par de forts mathématiciens, s’écrouler au premier passant, — en revanche, l’empirisme, livré au seul hasard, à ses tâtonnemens aveugles, demeure infécond et risque de s’égarer en des tentatives sans issue. Poincaré l’a dit et répété une accumulation de faits n’est pas plus une science qu’un tas de pierres n’est une maison. Il importait donc de classer pour le passé, de dresser suivant des plans définis pour l’avenir, d’ordonner en un mot, l’étude technique de l’aviation naissante ; il importait de remplacer, l’empirisme hasardeux par l’expérimentation définie. Cette œuvre est celle de l’aérotechnique, et les progrès faits dans cette voie, les méthodes élaborées, dont nous allons dire un mot, et qui touchent aux procédés les plus délicats de la philosophie naturelle, — j’entends ces mots dans leur sens anglais, — ont certainement été pour une large part, pour la plus large part, dans les progrès étonnans que l’aviation a faits depuis quelques années ; c’est d’eux qu’il faut attendre surtout de nouveaux perfectionnemens et de nouvelles découvertes pour l’avenir. Et c’est ainsi que si l’aviation n’est peut-être pas la fille légitime, ni même la fille naturelle de la science, elle en est la fille adoptive tendrement aimée.


Nous avons vu que l’équilibre et la vitesse d’un avion dépendent avant tout de la résistance de l’air sur ses surfaces diverses. Cette