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de la littérature ecclésiastique au siècle de saint Augustin, à la littérature française la plus contemporaine. La Revue des Deux Mondes n’a pas de lectrice plus assidue ni plus fidèle. Et elle prend prétexte de ses admirations intellectuelles, pour faire remarquer que les écrivains français et les écrivains italiens ont été les premiers messagers de paix et comme les ambassadeurs de la concorde fraternelle entre les deux nations.

Dans ce recensement sommaire des amitiés françaises en Italie, comment ne pas songer, en effet, à tous les écrivains de l’autre côté des Alpes, qui, longtemps d’avance, ont préparé l’accord nouveau ; et, parmi eux, à celui qui, à la fin d’un discours désormais historique, proposait à la foule d’acclamer la reine Marguerite, grand cœur italien ; à celui que la France peut considérer presque comme une de ses gloires, et qui domine les autres de toute la hauteur de son génie et de son héroïsme civique, — à Gabriele d’Annunzio ?…


Des suffrages comme ceux-là peuvent nous rendre fiers, parce qu’ils manifestent d’une façon éclatante l’état général de l’opinion. Cette prépondérance des interventionnistes, comme on appelle, en Italie, les partisans de la guerre contre les Empires centraux, — c’est là le point capital. Ailleurs, dans certains pays neutres, on s’est amusé à dresser des listes de francophiles, — jeu extrêmement dangereux : car à une liste s’oppose immédiatement une contre-liste beaucoup plus empanachée. Jeu inutile aussi : quand on entre dans une chambre, on n’a pas besoin de thermomètre pour savoir s’il y fait froid ou s’il y fait chaud. Cela se sent dès la porte. Or, en Italie, il est trop sensible qu’il fait chaud pour nous. Une fois qu’on a été enveloppé par cette chaude atmosphère de sympathie, on ne s’inquiète pas, si l’on constate que, dans tel ou tel recoin du logis, la température est plus basse.

On n’en a point l’impression dès l’abord. L’effort patriotique parait entraîner toute la masse de la nation. Dans la presse, pas une note discordante. Et cependant, l’opinion, tout en étant à peu près unanime dans sa volonté de poursuivre la guerre, trahit bien des nuancés et même des diversités. La chose qui nous surprend le plus, nous autres Français, c’est qu’il y ait