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enlevées ; une tentative sur le village, exécutée malgré les ordres, échoua ; mais plus à l’Est, il se trouva presque coupe de Souchez. Sur la colline de Lorette, les Français enlevèrent trois lignes de tranchées et se maintinrent, recevant dans le flanc gauche les feux de la route d’Aix-Noulette, de front, les feux d’Angres, dans le flanc droit, le tir des mitrailleuses d’Ablain. Le combat continua les jours suivans. Le 11, les Français, sur la colline, enlevaient la chapelle et le fortin voisin ; dans la nuit du 13, au Sud de la colline, ils enlevaient Carency. Le 21, ils enlevaient l’avant-dernier des éperons méridionaux de la colline, celui de Blanchevoie. Le 29, ils enlevaient les dernières maisons d’Ablain. Le 31, ils enlevaient deux positions avancées au-delà d’Ablain, le moulin Malon et la sucrerie de Souchez.

Toute la colline de Lorette était dans nos mains, et le front allemand passait désormais par Souchez. Souchez est juste à l’extrémité Sud-Est de l’éperon, en plaine. Les routes qui vont du Sud au Nord, d’Arras vers Béthune, et qui se gardent d’escalader l’éperon le contournent par Souchez. Elles traversent là une petite rivière, la première des rivières picardes que nous rencontrions, mince et pure, avec une large vallée, humide et verte, bordée de prairies et de marécages.

La trouée de Souchez interrompt l’accident de Lorette, mais ne le termine pas. Il renaît immédiatement à l’Est de la ville, et se prolonge vers le Sud-Est ; mais il change de nom ; il s’appelle maintenant la falaise de Vimy. De même que la colline, de par sa face Nord, dominait toute la plaine du charbonnage, de même la falaise de Vimy, qui la continue, domine toute la plaine de Douai. Dans l’un et l’autre cas, le regard de faille est à pic, face au Nord-Est.

Seulement il existe entre les hauteurs de Lorette et de Vimy deux différences. L’une est d’ordre géographique ; c’est l’inégalité de hauteur et d’étendue. Lorette s’élève à 194 mètres, la falaise de Vimy culmine à 140. L’autre différence est d’ordre militaire. A Lorette les deux adversaires barraient l’éperon en travers. A Vimy les fronts sont non plus perpendiculaires, mais parallèles à la faille. Les Allemands tiennent toute la longueur de la colline, adossée à la crête, pour nous interdire de l’atteindre et de redescendre vers Douai. Ils sont pour ainsi dire placés sur le mur d’une place, le fossé derrière eux. Nous essayons de les pousser dans ce fossé.