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a été tuée, une autre a eu trois doigts coupés, une autre est devenue folle. Un soldat qui était en permission a mis un terme à cette misère en repoussant l’agent de police. N’était-ce pas honteux ? »


Aplerbeck, 2 avril.

«...Il faut que je t’apprenne un événement qui s’est passé hier matin à Dortmund. Une femme allait réclamer un secours plus élevé parce que son mari est en campagne et qu’elle ne peut suffire avec ses six enfans. Comme on ne lui accordait pas davantage, elle donna une gifle au Commissaire de Police, ce que celui-ci n’accepta pas (sic) et il la tua. Alors il y eut un rassemblement de femmes ; toute la rue de Lenten était remplie de monde. Le soir, les soldats y ont passé à cheval pour disperser les femmes. Si le policier était sorti, certainement elles l’auraient assommé aussi. Du reste il y a ici, à Dortmund, Cologne et dans les environs, une excitation sans pareille... Si cela continue ainsi, il se produira bientôt quelque chose ; il y a assez de misère ainsi et nous voulons espérer que cela ne durera pas plus longtemps. »


Breslau, 27 avril.

(A l’OberleutnantL..., du 202e Rég.)

«...Il y a eu, parait-il, hier, des cris devant l’Hôtel de Ville. Ces jours-ci ton père a soutenu que s’il y avait une révolte, il se mettrait à la tête comme chef... »

Ne croyons point que ce père d’officier soit aussi prêt à se mettre à la tête d’une révolte et que cette révolte soit proche, — si l’on veut parler d’une révolution. Mais la révolte est au moins dans bien des cœurs. Elle gronde tantôt contre « ceux qui ont causé la guerre et y trouvent encore de l’intérêt » (11 avril), tantôt contre « les spéculateurs qui amènent la famine plus sûrement que les Anglais » (mai), contre la police qui force les femmes à défiler devant les boucheries « au pas de parade » et reçoit les plaintes « à coups de plat de sabre » (2 avril), contre « les riches agrariens » qui accaparent « en leurs lardoirs » les cochons immolés (6 avril), contre les grands a qui n’ont qu’à se débrouiller » (27 mars), contre « messieurs les officiers servis d’abord » (27 mars).

« La guerre est bonne pour les riches ; ils deviennent encore