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Emmendingen (Bade), 6 mars.

«... Étant donnée la grande quantité de troupes qui se trouvent là-bas et le raccourcissement du front devant Verdun, les troupes doivent pouvoir être relevées. L’assaut n’a pas dû être terrible : pourvu que cela ne vienne pas après ! »


Sans doute, les soldats ne partagent pas ces illusions. Nous verrons qu’ils trouvent, eux, l’assaut fort « terrible. » Mais certains, en dépit des premiers échecs, gardent les grandes espérances. On sent cependant un peu de trouble même dans les lettres courageuses.


Devant Verdun. 8 mars 1916.

«... Depuis quelques jours, notre avance est arrêtée... Nous sommes maintenant dans le village d’Avoncourt (sic) près du fort de Vaux. L’artillerie française, qui est ici en quantité formidable, nous canonne sévèrement et continuellement. Je crois qu’on n’a pas encore dans toute la guerre enlevé une forteresse aussi puissante que Verdun. Si nous pouvions l’avoir ! »


Et voici que, comme un écho, arrive d’Allemagne, le 20 mars, l’expression d’un trouble profond :


H..., le 20 mars.

« En ce qui concerne la chute de Verdun, les gens d’ici ont des opinions différentes. Un parti est d’avis que, par la chute de Verdun, on en arrivera à une décision entre la France et l’Allemagne ; l’autre parti dit : « Nous avons Verdun, il est vrai (sic), mais il s’en faut de beaucoup que nous ayons la France. »

A la vérité, les communiqués de temps à autre triomphans de l’État-major relèvent les espérances. Un homme convaincu écrit de Bojanowo, en Posnanie, le 20 mars, que son ancien chef de bureau « prend part aux grandioses succès de Verdun (sic). » « Je lui ai souhaité, ajoute-t-il, bonne chance pour de nouveaux succès et un heureux retour, et en particulier qu’il puisse prendre part à la prochaine entrée à Verdun. »

Il va sans dire que les « bonnes nouvelles » trouvent créance assez facilement ; on écrit de Bruchhausen, 26 mars : « On dit dans les journaux que Verdun est incendié et que les Français sont cernés, » et le même jour, d’Altona : «... Hier, nous