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une Festparade sur la place d’armes de Verdun et la paix sera signée. »

Tels sont les propos que le Kronprinz en personne tient aux troupes massées autour de Verdun. Tels sont tout au moins ceux que rapportent deux déserteurs lorrains.

Ont-ils été exactement reproduits ? Qui oserait l’affirmer ? Mais quant à la pensée qu’ils formulent, elle éclate dans tous les faits, gestes et paroles des chefs allemands à la veille de l’attaque ; et tous leurs soldats croient bien, dans les premiers jours de février, se préparer à un assaut de Verdun qui, au dire des officiers, aboutira promptement à l’occupation de la ville et de la région et « contraindra la France à une paix séparée. »

C’est la grande espérance : des États-majors, elle s’est répandue dans la troupe, de la troupe dans la nation.

L’intention est formelle de prendre Verdun. On attaquera Verdun et de telle façon que l’infanterie n’aura plus qu’à occuper des positions bouleversées par un tir d’artillerie sans précédent. « Nous n’aurons plus qu’à avancer au pas de parade, » dit un déserteur. Et cette affirmation se répète dans plusieurs interrogatoires. Commentant la proclamation du Kronprinz, les officiers affirment qu’on vaincra. Des déserteurs polonais recueillis à la cote 221 affirment que l’offensive a pour but de « cerner entièrement Verdun. » Le 24 février, des prisonniers du ...e d’infanterie rapportent que, le 18, leur a été lu un ordre du jour très bref, déclarant que « la guerre de position a suffisamment duré » et « qu’il faut maintenant terminer la guerre en prenant une grande offensive. » « C’est pourquoi, ajoute le Kronprinz, je donne l’ordre de se porter à l’attaque de la place forte de Verdun. »

Une telle perspective provoque chez les uns de grandes espérances, chez d’autres de grandes craintes.

Les espérances l’emportent au début. A la vérité, on constatera qu’elles sont moins excitées par la perspective de la victoire elle-même que par celle de la paix qui en sera la suite. Le soldat R..., du 8e fusiliers (21e division), écrit :


21 février.

« Ma chère mère,

« Je vous annonce que nous arrivons à un grand moment ; nous avons reçu l’ordre de prendre d’assaut la cote 344 près de