Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 33.djvu/877

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
DEVANT VERDUN

L’AVEU ALLEMAND
EXTRAITS DE LETTRES ALLEMANDES

Lisons les journaux allemands depuis le 21 février ; ils sont censés traduire l’opinion allemande. Assurément nous les voyons, suivant les vicissitudes de cette interminable bataille, déborder d’enthousiasme ou prêcher la patience. Je viens de relire ces articles et il serait déjà possible de montrer, d’après les extraits de cette presse cependant asservie, quelle déception a causée à l’Allemagne la tentative avortée contre ce que le Kronprinz appelait (fort improprement d’ailleurs) « le cœur de la France, » et l’Empereur lui-même, dans une dépêche célèbre, « la principale place forte de notre principal ennemi. » Mais une impression autrement vivante, et je dirai criante, — en tout cas singulièrement plus sincère, — se dégage d’une autre source : ces centaines de lettres que nous avons saisies, que nous saisissons tous les jours sur les prisonniers et les morts allemands de la grande bataille. Lettres adressées d’Allemagne aux soldats, ou lettres que le prisonnier ou le mort allait envoyer lorsque le destin l’a frappé, nous les avons là toutes devant nous. Je les ai lues avec soin, et de même j’ai vu interroger maints de ces prisonniers dont le témoignage verbal venait s’ajouter aux témoignages écrits. Une habitude déjà vieille de manier le document et d’en faire jaillir la vérité m’a amené