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se sont bornés à l’investir. Attaqués même dans un assez grand nombre de positions qu’ils avaient occupées, ils en ont été délogés et ils ont été contraints d’éloigner leurs lignes d’investissement. Avec les troupes qu’ils ont, leur circonférence étant très étendue, la ligne d’investissement ne doit pas être bien épaisse sur certains points. C’est sur l’un de ces points qu’il faudrait la percer. Immobiles jusqu’ici dans leurs retranchemens, attendent-ils leurs grosses pièces de siège pour passer de l’investissement à l’attaque ? C’est peu vraisemblable. S’ils parvenaient à jeter quelques bombes sur quelques coins de Paris, ils ne parviendraient jamais à prendre Paris. Paris, défendu comme il l’est, est imprenable. Il est donc à croire qu’ils se borneront à en maintenir l’investissement et qu’ils espéreront, à la longue, le réduire par la famine. La famine est bien loin, et les ressources sont encore très abondantes. Mais il faut qu’à Paris et en province, on s’applique à déjouer le plan des Prussiens et qu’on ne néglige rien pour le faire tourner contre eux...

« Tout à toi de tout mon cœur.

« Mignet. »


La lettre qui suit, de M. Duvergier de Hauranne, a. été écrite le jour même où se signait la capitulation de Bazaine à Metz ! Malgré ses répugnances à toute tractation avec les Prussiens, Gambetta a consenti à ce que M. Thiers allât discuter avec le gouvernement de Paris la question de l’armistice. M. Thiers part le 28 octobre, muni de passeports allemands ; il ira à Versailles voir M. de Bismarck. Mais devant la fermentation des esprits à la nouvelle de la capitulation de Bazaine, le gouvernement de Paris sera obligé de repousser les conditions humiliantes que la Prusse veut imposer à la France. M. Duvergier de Hauranne note l’état d’esprit répandu dans les campagnes et enregistre des bruits singuliers — qu’on a vus reparaître de nos jours sous des formes à peine différentes. Il formule déjà au sujet de l’Alsace ce qui sera le sentiment de la France durant un demi-siècle. Il y a lieu de signaler dans cette lettre un passage favorable à Gambetta. Les papiers de M. Thiers, pour l’année 1870, ne contiennent à peu près rien venant de Gambetta. Mlle Dosne paraît, en outre, n’avoir voulu conserver que les documens plutôt défavorables à l’organisateur de la défense nationale.


M. Duvergier de Hauranne au même.


Herry. (Cher, 27 octobre 1870.

« Mon cher ami,

« Quand j’ai appris votre retour à Tours, j’ai pris la plume pour vous écrire ; mais j’ai pensé que vous aviez beaucoup