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pour la France et pour la cause de la paix. M. Gladstone tient trop à sa popularité pour ne pas tenir compte, dès qu’il le pourra, d’un mouvement aussi considérable. Mais il faudrait que la situation actuelle, en se modifiant, lui en fournît l’occasion. Il est regrettable, à ce point de vue, que les élections générales aient été encore ajournées. Telle a été du moins l’impression générale en Angleterre.

« En reprenant mes relations avec lord Granville, je l’ai trouvé sous le charme de vos derniers entretiens avec lui.

« Je vous prie d’agréer...

« TISSOT. »


Les mêmes situations réclamant les mêmes remèdes, on va voir M. Thiers définir ici à un correspondant politique la nécessité, en 1870, de l’ « Union sacrée, » qui, à tant d’égards, a été si peu réalisée alors, comme on le constatera plus loin par une lettre du comte Daru. La lettre qui suit offre des considérations dont chaque terme peut être repris et médité aujourd’hui avec profit.


M. Thiers à M. Dréolte, ancien député.


Florence, 18 octobre 1870.

« Monsieur,

« Je n’ai reçu qu’à Florence, et le 15 octobre, la lettre que vous m’avez adressée de Monaco le 19 septembre. Cette circonstance vous explique mon silence, votre lettre ayant dû courir toute l’Europe pour me rejoindre. Je pense comme vous, monsieur, que l’union de tous les partis unis, non pour leur avantage personnel, mais pour sauver le pays, peut seule nous aider à sortir de l’abime où nous sommes tombés. La forme, le titre du nouveau gouvernement importent peu, et il faut joindre nos efforts à ceux de tous les hommes honnêtes, qui, mettant de côté leurs préférences personnelles, travailleront d’abord à arracher le pays des mains de l’ennemi et à le reconstituer ensuite. Je ne sais ce qui nous attend, mais, pour moi, je continuerai à consacrer les forces qui me restent au service de notre chère et infortunée patrie, heureux de voir s’augmenter le nombre de ceux qui la serviront sincèrement, et peu enclin à le diminuer par des exclusions aussi injustes qu’impolitiques.

« Agréez...

« A. THIERS. »