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LA
GUERRE DANS LE LEVANT

SALONIQUE — ERZEROUM — TRÉBIZONDE — BAGDAD

Le canon de Verdun, en soulevant l’émotion du monde entier, a fait oublier la prise d’Erzeroum. Aujourd’hui que la bataille de la Meuse, après deux mois de combats acharnés, constitue définitivement l’échec le plus grave que les Allemands aient subi depuis les batailles de la Marne et de l’Yser et marque très probablement le déclin de leur force offensive, il paraît juste et opportun de revenir à ce théâtre d’opérations d’Orient, où les Alliés ont éprouvé bien des déboires et des revers, et qui garde pourtant toute son importance.

Qui peut douter aujourd’hui, si les Alliés, profitant de la belle victoire des Serbes sur les Autrichiens, en décembre 1914, étaient entrés résolument dans les Balkans par Salonique, au lieu de se laisser hypnotiser par le forcement des Dardanelles et la chimère de la reconstitution de l’union balkanique, que Constantinople et la Turquie seraient passées des mains des Allemands à celles des Alliés, que la Grèce, la Bulgarie et la Roumanie, malgré leurs attaches germaniques, auraient été entraînées sur les routes du Danube, et que la jonction avec les Russes se serait faite dans la plaine hongroise ?

On se demande vraiment comment les diplomaties ont pu oublier que la question d’Orient a été la cause directe de la guerre actuelle et qu’elle tenait une place prépondérante dans le vaste programme de l’impérialisme pangermanique. Le plan politique et militaire allemand visait sans doute l’hégémonie