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Ce sont donc uniquement les variations de la vitesse ou de la direction du vent, — et une variation de direction, la vitesse restant constante, se traduit par une variation de vitesse dans le sens de la marche, — qui peuvent troubler l’équilibre de l’appareil et sa route.

L’avion peut rencontrer des courans d’air ascendans ou descendans produits dans l’air par des différences anormales de température, au-dessus de certains endroits surchauffés (remous de chaleur) ou au contraire frais, comme les bois et les vallées qui refroidissent l’atmosphère sus-jacente. — De pareils courans d’air peuvent être produits aussi par les plis accentués du terrain qui engendrent au-dessus d’eux des sortes de vagues aériennes.

Un courant d’air ascendant soudainement rencontré a pour effet d’augmenter l’angle d’attaque, donc de faire monter l’avion. Un courant d’air descendant le fait au contraire baisser. Cette sensation brusque de descente est, — en avion comme en ascenseur, — beaucoup plus vivement ressentie physiologiquement que la montée. D’autre part, une descente rapide et imprévue est toujours beaucoup plus dangereuse auprès du sol qu’une montée équivalente. De là vient que les aviateurs ont donné au premier de ces phénomènes le nom de « trou d’air, » sans penser qu’à côté des trous d’air, il y a des « pics d’air. » — Il n’est pas douteux que les courans d’air descendans, les trous d’air ont été cause d’un grand nombre de chutes soudaines et d’écrasemens inexpliqués d’avions sur le sol. Tant il est vrai, les pilotes le savent bien, qu’à rencontre de ce qu’on pourrait croire a priori, il est, — même à l’abri des balles et des obus, — beaucoup plus dangereux de voler près du sol qu’à une grande hauteur.

Les variations horizontales de la vitesse du vent ont pareillement pour effet, lorsqu’elles se produisent dans le sens de la marche de l’avion, de faire monter ou descendre soudain celui-ci. Lorsqu’elles ont lieu obliquement, par rapport à la marche, elles se traduisent par une variation brusque dans l’orientation de l’avion.

Toutes ces causes perturbatrices ont des effets encore plus graves lorsque les filets d’air perturbateurs sont suffisamment étroits pour n’agir que sur une partie de l’appareil, une seule aile, par exemple, ou la queue. Le déséquilibre produit est alors beaucoup plus profond.

L’essentiel de l’art du pilote consiste précisément à savoir constamment, et par une manœuvre rapide et proportionnée des gouvernes et du gauchissement, rectifier volontairement, ou, mieux encore, d’une manière réflexe, toutes les causes de déséquilibre, et éviter tous ces écueils fluides et ces gouffres, diaphanes et perfides,