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sous d’autres noms ; comme au temps de l’Empire, ses chefs, réfugiés à l’étranger, recommençaient la préparation de leurs complots ; leurs centres dirigeans étaient le Japon, Hongkong, Singapour, l’Indochine, San-Francisco, où ils trouvaient l’appui moral et pécuniaire des dix millions de leurs compatriotes, dont l’élite fut le soutien le plus précieux de la révolution. Aussi, Yuen Chekai et son entourage s’efforçaient-ils de paralyser leur action ; ils cherchaient à conclure des conventions avec les diverses Puissances, afin que ces hommes dangereux fussent expulsés ou mis hors d’état de nuire.

En raison du voisinage de la Chine et du Tonkin, Yuen put signer avec le gouvernement français un accord en vue de réprimer toute action contre sa politique, soit en Indochine même, où résident plusieurs centaines de mille Chinois, soit sur les concessions françaises en Chine, et particulièrement dans l’importante concession de Changhai.

Des démarches analogues furent faites au Japon, lieu d’asile de certains leaders de l’opposition, et particulièrement du docteur Sun Yatsen ; mais le gouvernement japonais, fidèle à sa politique, ne voulut jamais entrer en conversation à ce sujet.

A l’intérieur, des mesures particulières furent prises pour réduire à l’impuissance les républicains, dont on prévoyait la colère lorsque la monarchie serait proclamée. Tous les gouverneurs militaires provinciaux, les tsangkiun, que Yuen s’était attachés, durent faire la chasse aux opposans et aux suspects ; mais l’imperfection de l’administration, la corruption du personnel rendait l’opération difficile et souvent vaine.

A Changhai, l’amiral Tseng, une première fois manqué, succomba enfin à seize coups de revolver. En d’autres provinces, on signala, dans les derniers mois de 1915, des faits analogues.

Mais, Yuen Chekai et ses conseillers, ne voulant pas tenir compte de la force des convictions qui animaient des hommes décidés à sacrifier leur vie à la cause qu’ils avaient embrassée, attachaient peu d’importance à ces prodromes du mécontentement populaire ; ils se laissaient aller à l’illusion, si commune chez les gouvernemens despotiques, de croire que la force peut avoir toujours raison de toutes les rébellions et qui ne distingue point entre celles-ci. Eux et les Européens, en Chine, se disaient, ainsi qu’en témoigne la lecture des journaux édités