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propagatrice par l’exemple des idées et des sentimens démocratiques, ne se créât pas sur les frontières de l’Empire autocratique, non loin de cette Sibérie où, lors de la révolution de 1905, des républiques locales, nées de la révolte, avaient dû être rapidement écrasées.

Quant aux Français, ces grands prêteurs d’argent, il leur semblait que leurs intérêts financiers seraient mieux garantis par un pouvoir personnel que par tout autre genre de gouvernement. Ils avaient aventuré beaucoup de capitaux en Chine, dans le passé ; ils avaient soutenu financièrement l’instauration de la dictature ; certains d’entre eux avaient même uni directement leurs intérêts financiers à ceux du dictateur lui-même, s’attachant ainsi étroitement à sa fortune.

Seuls, les Etats-Unis ne se montraient pas favorables à une restauration par raison de principe. Sur ce point, l’opinion de M. Wilson était bien connue.

Quant au Japon, il observait une attitude expectante, ménageant l’avenir, flattant et protégeant les républicains exilés depuis deux ans et demi.

Avant la guerre, ces deux dernières Puissances se trouvaient entraînées dans l’orbe d’attraction de l’Angleterre, de l’Allemagne, de la France et de la Russie, derrière lesquelles suivaient l’Autriche, l’Italie et les Puissances secondaires. Comment les États-Unis et le Japon, divisés d’ailleurs entre eux par de profonds dissentimens, auraient-ils pu faire bande à part ou rester isolés en dehors du formidable groupe mondial ? C’eût été se condamner à une impuissance fatale dans tout règlement des questions chinoises. C’est manifestement pour cette raison que ces deux Puissances, bien que s’étant montrées hostiles à la dictature de Yuen Chekai, lorsque celle-ci n’était encore qu’en préparation, se joignirent aux autres quand la diplomatie eut décidé de reconnaître la république chinoise, après le coup d’État de novembre 1913, qui faisait de celle-ci une pure illusion verbale.

Enfin, en dehors du monde officiel et des conseillers, les résidens européens en Chine, commerçans, gens d’affaires, courtiers de finance en quête d’emprunts à négocier, représentans de fabriques d’armemens désireux de conclure de gros contrats, attendaient également d’un gouvernement personnel de sérieux profits. Il n’était pas jusqu’aux trafiquans de bas