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continué le 2 mars 1916, bien que forgé au son du canon des guerres de la Révolution et de l’Empire, n’a prévu ni la mobilisation générale, ni la nation armée. Les législateurs de 1803 n’ont pu deviner qu’un jour viendrait où tous les hommes valides seraient sous les drapeaux. Notre devoir est de combler cette lacune, de venir au secours des parties et de régler ce qu’elles ont oublié de prévoir. « Lorsqu’on nous parle, dit-il, du respect des contrats, lorsqu’on nous reproche de violer ce principe intangible, ne nous sera-t-il pas permis à notre tour de demander si c’est bien assurer ce respect que de maintenir arbitrairement dans les liens d’une obligation le débiteur qui a cessé de recevoir, par suite de la force majeure, l’équivalent du prix qu’il s’est engagé à payer, c’est-à-dire la jouissance en vue de laquelle il a traité ? N’est-ce pas au contraire se conformer au vœu d’une impérieuse justice que de proclamer la nécessité de répartir équitablement les risques de guerre entre les deux parties contractantes, dès lors qu’elles ont omis de prévoir ce risque et d’en répartir les effets ? »

M. Ignace emprunte un argument à la récente juridiction administrative : le Conseil d’Etat a admis que certains contrats d’éclairage conclus entre des Compagnies et des municipalités pourraient être révisés, la hausse désordonnée survenue dans les prix du combustible n’ayant pas été envisagée : c’est ce qu’on appelle la thèse de l’imprévision.

Répondant à un député qui se plaignait que la question des baux ruraux ne fût pas réglée, le rapporteur répond que ceux-ci sont soumis à des règles et à des principes de droit tout à fait différens de ceux des baux à loyer. C’est ainsi que le Code civil ouvre au profit du fermier un droit à une réduction correspondant à une diminution dans le rendement des récoltes. Les mêmes solutions ne s’appliquent pas aux deux natures de contrats. D’ailleurs, un projet spécial aux campagnes a été déposé : M. Chavoix en est le rapporteur.

Ces bases une fois posées, la Commission a décidé que les exonérations ou réductions s’appliqueraient non seulement aux loyers restés impayés, mais d’une manière générale à tous les loyers échus pendant la guerre. Elle a rejeté la disposition n’accordant la réduction qu’à ceux des locataires qui justifieraient être, par suite de la guerre, dans l’impossibilité de payer, même avec des délais. C’était, d’après elle, « ne venir