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français s’exprimer par la libre élection d’une représentation nationale. » Jules Favre au contraire affirmait que le gouvernement français était prêt à convoquer cette assemblée, « si l’armistice avec ravitaillement le lui permettait ; » il ajoutait : « Je laisse à la conscience publique le soin de juger de quels côtés ont été les obstacles [1]. »

— « Lisez la circulaire de M. Jules Favre, mon cher monsieur, écrivait F. Buloz, et votre loyauté, votre sincérité ne pourront se refuser à voir où est la vraie ruse, le mensonge même. Vous ne pourrez non plus continuer d’accuser le gouvernement de repousser l’Assemblée nationale. Seulement, il la veut dans des conditions libres et rassurantes. Ceux qui la veulent autrement, veulent poursuivre des projets conçus dans je ne sais quelles intentions fâcheuses. Or, vous n’êtes pas de ces hommes-là.

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« Nous voulons nous faire estimer par une résistance honorable... Les ramollis sont ceux qui cèdent Sedan et Metz avec une armée de 100 000 hommes, non ceux qui préfèrent les dangers de la lutte, en un mot ceux qui la craignent [2]. »

En ce qui concerne l’Assemblée nationale, il faut rappeler ici qu’Ernest Renan publia dans les Débats de novembre 1870 trois articles relatifs aux élections... il en était très partisan, il estimait qu’il fallait y aviser immédiatement, se hâter de constituer une assemblée régulière élus par la nation, qui put traiter de la paix. L’armistice, qui devait permettre « d’assurer la liberté des élections, » n’ayant pas été conclu au début de novembre, et la question ayant été remise, Renan le déplorait ; il aurait voulu qu’on passât outre. « Il n’est pas admissible, disait-il, que la France se prive d’une fonction essentielle de sa vie nationale, parce qu’elle ne peut l’accomplir avec tout l’appareil ordinaire, et d’une manière uniforme dans toutes les parties de son territoire. »

Cependant, il est permis de se demander quelles auraient été de telles élections, sans armistice, pendant l’occupation allemande ; dans les départemens envahis par exemple ? Le

  1. Les Parisiens connurent donc la circulaire du comte de Bismarck et celle de Jules Favre concernant l’entrevue de Versailles, avant de lire le rapport de M. Thiers rapportant cette entrevue. Celui-ci ne parut dans les Débats que le 1er décembre d’après la publication du Times.
  2. Inédite.