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n’ont pu organiser ces régions avec la même puissance que les grands fronts français et russes. Le pays, quoique montagneux, se prête à la guerre de mouvement pendant tout l’été. L’armée serbe, ressuscitée et animée de l’âpre exaltation de la vengeance saura bien retrouver les chemins qu’elle a parcourus, victorieuse, en 1912 et 1913. Les routes qui conduisent à Sofia et à Constantinople, sont moins longues que celles qui vont au Rhin et à l’Oder. Nous avons déjà exposé nos idées à ce sujet dans un précédent article [1]. Nous n’y revenons que pour insister à nouveau sur l’importance capitale d’une décision et d’une offensive prochaines en Orient. La capitulation de Kout-el-Amara a été un événement fâcheux, au point de vue moral, mais c’est un incident militaire très réparable. Et il ne doit nullement arrêter la marche convergente des Russes et des Anglais sur Bagdad et Alexandrette.

On pourrait sans doute examiner de plus près les modalités de l’offensive relatives à chaque front, et rechercher les objectifs sur lesquels seraient dirigées les attaques principales. Mais nous entrerions ainsi dans un domaine où l’on risquerait de s’égarer et de donner prise à la censure. Nous en avons dit assez, croyons-nous, pour cette fois.


Pour résumer ces réflexions sur les conditions de l’offensive générale, nous espérons avoir éclairé l’esprit de nos lecteurs sur deux points :

1° L’offensive générale des Alliés ne peut être décidée que lorsque leur supériorité numérique et matérielle ne fera plus aucun doute. Il serait téméraire d’en conjecturer la date. Les gouvernemens et le haut commandement en sont seuls juges. Elle se produira, elle sera victorieuse. C’est affaire de patience et de constance des nations comme des armées.

2° Cette offensive doit être simultanée et poussée à fond sur tous les théâtres d’opérations. Cela ne veut pas dire que tout le monde bondira hors des tranchées à la minute réglée sur toutes les montres. Mais il faut que tous les fronts soient attaqués à la fois et dans toute leur étendue, que ni trêve ni répit ne soient laissés aux Impériaux jusqu’à ce que, d’abord, les territoires

  1. Voyez dans la Revue du 1er mai : La Guerre dans le Levant.