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les rigueurs du froid. Des moyennes ont été établies, d’après divers renseignemens recueillis et contrôlés dans les quartiers généraux et chez les Neutres. Elles varient par périodes et par théâtre d’opérations. Au 1er janvier, après dix-sept mois de guerre, nous avions nous-même estimé, d’après des données semi-officielles [1], le déficit global de l’armée allemande après de trois millions d’hommes. Et à ce compte, il serait aujourd’hui de quelques centaines de mille au-dessus. Il y aurait de la témérité à s’aventurer dans de telles évaluations, et à donner des indications bien fondées sur la valeur numérique des effectifs restans après déduction des pertes : l’indécision est trop grande. Mais on ne peut douter que l’usure des hommes soit très forte en Allemagne et en Autriche-Hongrie, peut-être encore plus chez cette dernière Puissance. Actuellement, toutes les classes de dix-sept à quarante-cinq ans sont en ligne ou appelées ; il y a quelques mois, le recensement discret des hommes au-dessus de quarante-cinq ans était commencé en Allemagne. En Autriche, les levées touchent jusqu’aux hommes de cinquante ans.

Les jeunes classes allemandes 1916, 1917 et 1918 ont fourni ou fourniront des renforts assez considérables, car elles atteignent 500 000 jeunes gens par classe, soit 1 500 000 hommes. C’est la réserve suprême pour deux années de guerre. L’appoint des vieux landsturmer a peu de valeur. On a constaté parmi les prisonniers faits à Verdun la présence de soldats de la classe 1916. C’est normal. Nous-mêmes avons dû commencer à en user. Sur le front russe, les unités allemandes comprennent une forte proportion de landsturm.

A combien s’élèvent les effectifs des armées aux fronts ? Il serait évidemment intéressant de le savoir, pour estimer, après décompte approximatif des pertes et des non-combattans indispensables [2], les disponibilités des dépôts, qui constituent le réservoir des renforts. Tout récemment, le Times a publié les ordres de bataille des armées allemandes sur les différens fronts. Le colonel Repington et le colonel Feyler, les éminens critiques militaires du Times et du Journal de Genève, les ont commentés à des points de vue très différens. Nous ne pouvons, dans cet

  1. Lettres à tous les Français, de la Ligue française. Lettre n° 3.
  2. Dans ces non-combattans entrent les mobilisés employés à l’usine de guerre, les garnisons indispensables à l’intérieur, les hommes restés à l’étranger. Ils sont à déduire du chiffre total de la mobilisation.