habite les deux bouts de l’Europe. L’isolement se faisait autour de Paris, le silence dans la province. « On nous dit qu’il y a de bonnes et grandes nouvelles, écrit George Sand le 26 septembre, nous n’y croyons pas. Paris investi, les lignes télégraphiques coupées ; nous sommes plus loin de l’activité que l’Amérique. » Les nouvelles qui lui parviennent sont décourageantes : « On dit que tout trahit, même Bazaine ; » ou surprenantes : « Des personnes qui connaissent Gambetta nous disent qu’il va tout sauver ! »
On accueillait tous les espoirs, on croyait aussi, et ceux qui avaient le plus combattu le fameux « caporalisme » y croyaient le mieux, à cette armée que le gouvernement de la Défense, « en frappant du pied, » faisait « sortir de terre. Même devant l’exemple qu’avait donné l’armée ennemie, entraînée, assouplie, exercée par une longue préparation, on supposait que celle qui « sortait de terre » pourrait lui résister, en triompher même, cette armée, que le comte de Bismarck appelait, dédaigneux, un « rassemblement de gens en armes, non une armée. »
Sa résistance, certes, elle fut héroïque ; on pouvait tout attendre de son esprit ; mais, hélas ! il fallut bien en convenir, « le plus clair, c’est qu’une armée sans armes, sans pain, sans chaussures, sans vêtemens et sans abri, ne peut pas résister à une armée pourvue de tout et bien commandée [1]. »
On sait que Paris, après l’entrevue de Verrières, fut indigné des prétentions arrogantes de l’ennemi ; plutôt que d’y accéder, « Paris, exaspéré, s’ensevelirait sous ses murailles [2], » s’écriait le gouvernement, et « la population tout entière se trouva réunie comme par enchantement dans une commune résolution de tenir bon jusqu’à la mort [3]. »
Cette résolution fut la même partout, et F. Buloz l’adopta avec passion ; on le verra dans sa ligne de conduite, on le verra dans les lettres à Ernest Renan, qui vont suivre. Ceci ne l’empêcha pas d’être sensible aux mille soucis de chaque jour, aux