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de vous rappeler, Antoinette et moi, ainsi que notre famille, au gracieux et bienveillant souvenir de Vos Majestés et de rester avec le plus profond respect, Sire, de Votre Majesté, le très obéissant serviteur et neveu, Léopold de Hohenzollern. »

Certains critiques pourraient ne voir ici qu’un hommage officiel, mais il y a plus. Les Hohenzollern ne manquaient alors aucune occasion de se rappeler aux bontés de l’Empereur, tant ils avaient besoin de son appui. Enfin, un membre d’une branche collatérale, Rossignol d’Astorg, oncle du prince de Hohenzollern-Sigmaringen, premier ministre de Prusse, sans fortune et père de cinq enfans, présenté en 1852 à l’Empereur et nommé commissaire de surveillance administrative des chemins de fer français, déclare ne s’être élevé au commissariat de 1re classe que par ses bons services. Les appointemens étant insuffisans, il sollicite, le 13 mars 1859, Sa Majesté pour obtenir le grade d’inspecteur.

On voit bien que les Hohenzollern n’avaient pas encore les ambitions excessives qui amenèrent cette famille à seconder les desseins perfides de M. de Bismarck et du roi Guillaume. Tant que l’Empereur parait jouir en France et en Europe d’une situation privilégiée, ils s’inclinent devant sa puissance, lui prodiguent leurs fades complimens et l’assurent de leur respect, de leur dévouement, de leur attachement même. Ils rappellent leur parenté avec la dynastie impériale et s’en enorgueillissent devant toute l’Europe, jusqu’au jour où ils pourront être ingrats sans danger.

Que de princes, que de hauts seigneurs, de comtes, de barons, de grands personnages ont, de 1852 à 1869, offert ainsi à l’Empereur leurs hommages, leurs éloges, leurs adulations ! C’était presque une tradition, car un de nos plus féroces ennemis, l’historien Heinrich von Treitschke, remarquait lui-même que déjà, sous le premier Empire, ses compatriotes rivalisaient de courtisanerie à l’égard de Napoléon Ier et de la France. Il avait trouvé dans un cabinet d’autographes, à Cologne, des lettres extraordinaires de l’Electeur de Bade et du landgrave de Fürstenberg et de Hesse, du prince d’Isenburg, du duc Friedrich de Mecklembourg, de la princesse régente de Œttingen-Wallerstein, du Sénat des villes libres de Brème, Lubeck et Augsbourg qui faisaient assaut de respect, de vénération, d’admiration, de reconnaissance et d’attachement envers le