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qu’il a d’autres poésies à offrir et qu’il est prêt à les publier, si on lui avance pour cela quelques milliers de francs. Ch. Cerichtsnige présente aussi des vers pour cette heureuse naissance et remercie l’Empereur de procurer à sa famille « un pain qu’elle abreuve tous les jours des larmes de sa reconnaissance ! » L’ancien bottier du prince Eugène se joint à tous les admirateurs du jeune prince. Un ferblantier de Breslau, « disciple d’Apollon, » décrit sa joie en vers bien étamés ; un télégraphiste de Dresde, « sentinelle avancée de la civilisation française, » envoie ses félicitations enthousiastes ; un ouvrier Israélite, né le même jour, à la même heure que le prince, écrit : « Dieu a fait ce jour, jubilons et réjouissons-nous à cause de lui. » Il commente, comme un chrétien, le Hæc Dies quam fecit Dominus de la fête de Pâques. Le négociant Lœwenstein se réjouit de consister qu’il lui est né une fille dans la même nuit que le petit Prince et il saisit cette occasion pour déposer ses vœux sur les marches du trône.

L’écrivain Sauter espère que l’enfant de France sera le prince de la Paix et il lui envoie un produit de sa Muse. Le baron von Buttenheim, filleul de Napoléon Ier, sollicite, à propos de cette heureuse naissance, la croix d’honneur. Le conseiller Weissgerber a écrit une petite pièce sur la naissance du Prince impérial, pièce où figure Vénus. Le poète allemand a soin d’indiquer en note que « Vénus était l’aïeule de César et aussi la mère des Grâces ! » Il avoue enfin qu’un de ses amis littéraires et français lui a dit franchement que ce poème n’était pas digne d’être présenté à l’Empereur. Que ne l’a-t-il écouté ?… Il y a encore des vers de la colonelle von Munsch, mais je crois que le lecteur ne les supporterait pas ! La Kultur allemande n’est décidément pas favorable à l’éclosion de bons vers français.

Donnons maintenant quelques épîtres de hauts personnages et nous aurons montré avec quelle abondance les Allemands répandaient sur les Tuileries leurs requêtes, leurs invocations, leurs sollicitations, leurs instances, leurs prières et leurs importunités.

C’est une parente de Bismarck veuve d’un ancien officier allemand au service de la France, Mme von Bismarck, qui écrit à l’Empereur :

« Sire ! La veuve d’un ancien officier de votre glorieux oncle Napoléon le Grand ose se prosterner aux pieds du trône de V. M.,