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mais il ne peut s’agir que de cas très particuliers. Le ministre des travaux publics a rectifié cette assertion en ramenant à 6, 7 et 8 francs au maximum la moyenne de surestaries par tonne. En prenant le chiffre intermédiaire de 7 francs et en le multipliant par les importations, on arrive à cette conclusion qu’il faut fixer approximativement à 21 ou 22 millions le tribut mensuel que nous payons aux marines française et étrangères, sous forme de surestaries. C’est déjà un total impressionnant !

Il en est ainsi, parce que les quais exploitables ne sont pas assez vastes et que le déchargement des navires ne s’opère pas avec assez de rapidité. Bien avant la guerre, on se plaignait de l’exiguïté de nos ports et les Chambres de commerce avaient entrepris, à peu près partout, des travaux d’amélioration importans. On a dû improviser des installations de fortune pour augmenter les postes de déchargement. Les autorités locales ont fait preuve de beaucoup d’initiative, mais elles n’ont pu d’un coup de baguette magique faire reculer les berges des fleuves et surgir du fond de la mer les blocs de béton.

Je dois dire, enfin, que les bases navales militaires ont accaparé une surface très appréciable de quais. A Rouen, le port appartient presque entièrement à l’armée britannique ; au Havre, à Dieppe, à Boulogne, celle-ci possède des terre-pleins spacieux. A Marseille, le trafic pour le compte de l’Etat (guerre, marine, ravitaillement de la population civile) enlève au commerce la libre disposition de la moitié environ de la superficie totale des hangars, soit 63 000 mètres carrés. La base française occupe les hangars 3, 4 et 6 et 15 000 mètres carrés du quai des Anglais, soit 35 000 mètres carrés. La base britannique dispose des hangars 7 et 8 du môle D et de 1 000 mètres carrés environ du quai des Anglais : soit 28 000 mètres carrés. Au surplus, nous ne nous en plaignons pas et nous les lui cédons de bon cœur...

Après bien des tribulations, voici notre navire à quai. Hélas ! il n’est pas encore au bout de ses peines, car les dockers lui feront souvent faux-bond. La mobilisation a privé l’acconage de ses hommes les plus jeunes et les plus vigoureux. On a essayé d’employer des étrangers, des Espagnols, des Kabyles, des Marocains : ces expériences n’ont point donné ce qu’on en espérait. Les prisonniers allemands, au contraire, nous ont rendu des services. Je les ai vus pour la première fois à Saint-Nazaire,