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Cette escadre combinée aurait la vitesse de ses élémens les moins rapides, c’est-à-dire des transports, car les croiseurs de combat vont de 27 à 30 nœuds, les croiseurs légers de 27 à 28 et les « destroyers » atteignent 32 nœuds. Mais il faut remarquer que ce sont là des vitesses d’essais que l’on ne retrouve pas facilement dans la navigation courante. Or, pour des motifs bien connus des spécialistes, l’écart entre ces vitesses d’essais et les allures pratiquement réalisables pendant une traversée est bien moindre pour les vapeurs de commerce que pour les navires de guerre. En somme, la force navale en question verrait très probablement s’établir l’accord des vitesses entre bâtimens des deux catégories vers 20 ou 21 nœuds ; c’est-à-dire que, si elle visait l’une de nos îles, — ne précisons pas ! — du littoral de l’Atlantique, elle pourrait effectuer en moins de quatre-vingt-dix heures le trajet de 1 800 milles environ d’HelgoIand à cette île, en passant par le Nord de l’Ecosse après avoir couru au Nord jusqu’à la hauteur de Bömmel Oen, à peu près.,

« Mais il y a la flotte anglaise, dira-t-on, et justement sur les rades de l’Ecosse... » Sans doute. Toute la question est de savoir si l’on peut dérober à cette flotte une marche de trois ou quatre jours. Je ne dis pas que ce soit facile ni qu’il ne faille pas de la chance pour y arriver. Je répète seulement que c’est possible, avec des circonstances de temps favorables et d’adroites diversions du gros de la Hoch see lotte resté dans la mer du Nord. Ne venons-nous pas de voir que cette escadre des croiseurs de combat allemands a pu insulter impunément la côte anglaise, le 25 avril, et bombarder Lowestoft sans avoir affaire à autre chose que des croiseurs légers, des « destroyers » et — peut-être — des sous-marins ? Pourquoi la vaillante division des croiseurs de combat anglais de l’amiral Beatty, celle qui, deux fois déjà, avait refoulé l’ennemi en lui faisant éprouver des pertes (York et Blücher), pourquoi n’était-elle pas là ? C’est, suivant toute apparence, qu’elle avait été appelée du côté de l’Irlande où s’était produit, dès le 21, le mouvement que l’on sait. Et il était en effet, parfaitement logique d’admettre que les Allemands envoyaient de ce côté-là quelque chose de plus qu’un chalutier à vapeur et qu’un sous-marin.

Les Allemands, toujours si bien renseignés, n’ont-ils pas été prévenus, du reste, de ce faux mouvement des adversaires qu’ils redoutent le plus ? Cela encore est fort possible. Toujours est-il