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VII

Lorsque, à la fin de juillet, et du 1er au 3 août 1914, l’Autriche-Hongrie et l’Allemagne déchaînèrent la guerre en Europe, le Japon venait de traverser une crise intérieure et constitutionnelle d’une sérieuse gravité. Quatre ministères s’étaient succédé dans le court espace de dix-huit mois. Il n’avait pas fallu moins, pour en finir, que faire appel à la haute autorité d’un vétéran des anciennes luttes, du comte Okuma, tiré à soixante-seize ans de la retraite où sa popularité n’avait cessé de grandir. — Dans les premiers jours de la guerre, et avant que l’Angleterre n’eût, au sujet de la neutralité du territoire belge, adressé son ultimatum à l’Allemagne, le gouvernement japonais avait d’abord fait lui-même une déclaration de neutralité. Mais, dès que l’Angleterre fut entrée dans le conflit, dès que, par conséquent, se présentait le casus fœderis prévu par l’alliance anglo-japonaise, l’Empire mikadonal était prêt à remplir tout son devoir, à s’acquitter de toutes les tâches qui lui seraient dévolues.

Le 15 août, après s’être concerté avec le gouvernement britannique, le gouvernement japonais adressait au gouvernement allemand une note délibérément rédigée sur le modèle de celle qu’il avait reçue lui-même du ministre d’Allemagne à Tokio au printemps de 1895 après la paix de Shimonoseki. — Le gouvernement impérial japonais, pour la préservation de la paix de l’Orient et des intérêts généraux dont l’alliance anglo-japonaise avait prévu la défense, croyait devoir donner au gouvernement allemand l’avis : 1° de retirer immédiatement des eaux chinoises et japonaises ses bâtimens de guerre et ses navires armés de toute espèce, ou de désarmer ceux qui ne pourraient être retirés ; 2° de livrer aux autorités japonaises à une date n’excédant pas le 15 septembre au plus tard, sans condition ni compensation, le territoire cédé à bail de Kiao-tcheou, en vue de la restitution éventuelle dudit territoire à la Chine. — Le gouvernement japonais ajoutait que si, à la date du 23 août, le gouvernement allemand ne s’était pas conformé à cet avis, il serait lui-même forcé de réserver son entière liberté d’action pour les mesures qu’il jugerait nécessaire de prendre. — Le gouvernement allemand ayant fait savoir verbalement dans la matinée du 23 août qu’il ne jugeait pas devoir