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de la réciprocité absolue. Le Japon, qui s’était affranchi en 1894 des privilèges de la juridiction extra-territoriale et consulaire, recouvrait en 1911 la libre disposition de ses tarifs douaniers, n’accordant de tarifs conventionnels et réduits qu’aux Puissances qui pouvaient lui consentir des avantages égaux ou similaires. Il achevait et consacrait ainsi son entière assimilation aux grandes Puissances de l’Ouest dont, étant l’égal, il était plus libre de demeurer ou de devenir l’allié.


VI

La première grande crise qui permit d’éprouver et d’attester l’efficacité, la sûreté du puissant instrument créé par les accords du Japon avec l’Europe, je veux dire avec la Triple-Entente, ce fut la Révolution qui éclata en Chine au mois d’octobre 1911.

Ce qu’eût été cette révolution, si le Japon n’eût pas été en alliance ou entente avec les Puissances les plus intéressées de l’Ouest, si ces Puissances elles-mêmes n’eussent pas été amies et n’eussent pas d’avance prévu et défini le concert de leur action avec celle du Japon, il n’est que trop aisé de se le représenter. — Le danger fut conjuré parce que, dès le principe, il fut évident que le Japon et les Puissances alliées ou amies étaient résolus à ne pas laisser le foyer de la conflagration s’étendre et surtout à prendre, dès que les circonstances s’y prêteraient, les mesures nécessaires pour que l’ordre ne fût pas irrémédiablement troublé, pour qu’il n’y eût pas de vacance du pouvoir, pour qu’il y eût une autorité responsable avec qui négocier et traiter. — Si la dynastie mandchoue eût voulu et pu se défendre, s’il y eût eu encore à Pékin la main ferme de l’Impératrice douairière, les Puissances eussent sans doute, comme elles l’avaient fait en 1860 et en 1900, aidé et concouru à son maintien. — Mais la Cour s’étant aussitôt confiée à l’ancien ministre disgracié, Yuan che kai, et celui-ci n’ayant eu d’autre plan et tactique que de négocier avec la Révolution, la Révolution, d’autre part, consentant à entrer en pourparlers avec Yuan et à faire de lui l’intermédiaire entre le Palais impérial de Pékin et l’Assemblée dite nationale qui s’était spontanément réunie à Nankin, il est clair que c’était avec Yuan qu’il y avait à compter et s’entendre et que c’est lui qui serait le maître de l’heure.

Très vite, par la nécessité même de la situation, par la