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l’aveuglement des gouvernemens européens qui laissaient ainsi évincer et déposséder leurs nationaux.

Ces manœuvres, il est vrai, n’étaient pas toujours couronnées de succès, comme il advint notamment dans le cas de la proposition ou du « Memorandum » de M. Knox. L’Allemagne avait pensé que les entraves suscitées à la pénétration russe et japonaise en Mandchourie et en Mongolie seraient en Asie l’équivalent des embarras qu’elle cherchait à créer en Europe à la politique française au Maroc et à la politique russe dans les Balkans. Mais précisément, de même qu’en Europe ces efforts de l’Allemagne ne réussirent qu’à consolider les liens de l’ « Entente cordiale » franco-anglaise et de la Triple-Entente, ils n’eurent en Asie d’autre effet que de resserrer, de rendre plus étroits les liens du Japon et de la Russie. C’est du « Memorandum » de M. Knox et de la vaine tentative faite pour internationaliser le réseau ferré de Mandchourie que sortit l’accord russo-japonais du 4 juillet 1910 par lequel les deux gouvernemens délimitèrent avec plus de rigueur leurs zones respectives d’influence et d’action tant en Mongolie qu’en Mandchourie. Le Japon profita, d’autre part, de ce nouvel accord pour remanier en conséquence ses arrangemens et conventions de chemins de fer et de mines avec la Chine et pour proclamer son annexion définitive de la Corée (août 1910).

Les intrigues parallèles que l’Allemagne avait simultanément ourdies contre l’alliance anglo-japonaise, dont elle se flattait d’amener à bref délai la dénonciation, n’eurent de même pour résultat que le renouvellement anticipé, le 13 juillet 1911, du traité de 1902 déjà renouvelé et prorogé une première fois en 1905. Dans ce renouvellement de 1911, le traité n’avait plus à faire mention de la Corée, devenue depuis l’année précédente partie intégrante du Japon. Il contenait, en revanche, une disposition nouvelle aux termes de laquelle chacune des Puissances contractantes se réservait la faculté de conclure une convention d’arbitrage général avec une tierce Puissance. (C’était le cas pour l’Angleterre qui venait de négocier une convention de ce genre avec les Etats-Unis.)

Dans cette même année 1911, le Japon, poursuivant l’œuvre d’émancipation commencée en 1894, concluait et signait avec la plupart des Puissances de l’Ouest de nouveaux traités de commerce et de navigation conçus et rédigés selon les principes