Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 33.djvu/373

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

historique d’un groupement, d’un système politique, qui devait jouer un rôle essentiel et décisif dans la crise mondiale de 1907 à 1916. C’est par cet enchaînement des faits, des situations et des accords qu’après avoir rallié la France, l’Angleterre et la Russie et s’être rallié à elles dans la façon d’envisager et de régler les questions de l’Asie orientale, et notamment la question chinoise, il s’est trouvé relié lui-même à la politique de l’Europe et que, par une interprétation loyale, par un accomplissement généreux de son devoir, il est devenu l’allié de la Triple-Entente dans la présente guerre.

La France, la première, avait, dès 1906, compris qu’en définissant à nouveau ses relations avec le Japon, en reconnaissant les faits accomplis et les conséquences qui en résultaient, elle avait tout ensemble la mission, le pouvoir et le moyen de préparer, par ses propres arrangemens avec la cour de Tokyo, le rétablissement de rapports, non seulement corrects, mais cordiaux entre le Japon et la Russie, son alliée. Lorsqu’elle entama ses négociations avec le gouvernement du mikado et et qu’elle autorisa, au printemps de 1907, l’émission à Paris d’un emprunt japonais de 300 millions de francs, il était entendu que l’arrangement qu’elle allait conclure avec le Japon serait suivi d’un arrangement semblable entre la Russie et le Japon.— Le Japon, d’autre part, en se prêtant à cette tactique qui était conforme à ses propres desseins et intentions, prévoyait, souhaitait, encourageait et secondait le progrès ultérieur par lequel son arrangement avec la Russie serait suivi d’un accord général entre la Russie et la Grande-Bretagne, son alliée, sur les questions asiatiques (Perse, Afghanistan, Thibet), qui avaient été entre elles l’objet de longs litiges.

Les circonstances ont permis ou voulu que le même diplomate et homme d’État japonais qui avait, en 1902, comme envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire, signé à Londres le premier traité de l’alliance anglo-japonaise, fût, en 1907, à Tokyo, comme ministre des Affaires étrangères, l’inspirateur et le négociateur des accords avec la France et la Russie. Le comte Hayashi fut l’artisan conscient, réfléchi, heureux, de cette évolution qui de l’alliance anglo-japonaise tirait les principes et les élémens de rapprochement étroit avec les deux Puissances de l’alliance franco-russe. Il apporta à l’exécution de cette grande et magistrale politique, outre les vertus de sa race, la souplesse