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cinquième de la consommation ordinaire de l’Allemagne ; en fait, les marchands, malgré la loi et la répression judiciaire, le réservent à leurs bons cliens ou le cèdent, en prime, à qui fait chez eux d’autres acquisitions. La ration officielle d’un litre par mois est bien maigre pour un ménage ; heureux qui peut avec des protections accroître sa dose : « notre commune, écrit à la louange du sous-préfet un administré reconnaissant, a obtenu, grâce aux bons offices de la Kreisdirection, un fût de pétrole à répartir entre les habitans ; chaque famille recevra de la sorte deux litres supplémentaires. » On prêche l’économie et les chemins de fer badois donnent l’exemple, en faisant couper les mèches de lampe de façon que la flamme ne brûle que sur une demi-circonférence.

La benzine (de pétrole) s’est payée un moment jusqu’à 2 fr. 50 le litre ; mais depuis quelque temps le benzol (de houille) a été mis par les autorités militaires à la disposition de l’industrie avec plus de libéralité : Hambourg a reçu 100 000 kilos en février, et le général commandant le VIIe corps, ayant permis qu’il fût débité pur aux moteurs et aux automobiles, chacun s’est empressé de faire des provisions.

Le gaz, qui se paie maintenant à Berlin 20 centimes le mètre cube et seulement 17 centimes à Francfort, n’est pas comme en France une cause de perte pour les compagnies exploitantes, puisque c’est à peine si le charbon a haussé en Allemagne. On estime la production actuelle à 70 pour 100 de celle des plus fortes années ; or, en 1913, l’extraction avait été de 195 millions de tonnes, dont 40 millions vendues à l’étranger. Nos ennemis peuvent donc supporter sans dommage la mobilisation de nombreux mineurs, et l’emploi intensif des wagons pour l’armée qui a diminué l’activité des houillères. Leurs mines sont pour eux une grande force en temps de guerre, non seulement par le bon marché du charbon, mais par ses sous-produits que leur procure la distillation mensuelle de 1 800 000 tonnes de coke : l’ammoniaque sulfurique, le benzol et le toluol, utiles à la fabrication des explosifs.

Exportateurs de houille, les Allemands sont grands importateurs de bois ; tant arbres à feuilles que conifères, ils en introduisaient pour plus de 300 millions de marks d’Autriche et de Russie. La consommation de bois sur les deux fronts a été jusqu’ici à peu près égale : les forêts de Pologne et les territoires