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est telle que le salut des classes laborieuses vient en Allemagne de la pomme de terre. Elle vaut officiellement, ce printemps, 17 centimes le kilo à Berlin, ce qui nous parait bon marché et ce que nos ennemis trouvent cher, parce que ce prix est le double des anciens et aussi de ceux actuellement pratiqués dans les campagnes de Silésie : 68 millions d’habitans, en présence d’une récolte de 54 millions de tonnes en 1915, — contre 44 millions en 1914, — devraient, semble-t-il, avoir des pommes de terre à discrétion ; et l’on s’étonne que nos ennemis s’efforcent d’en importer de Pologne, de Courlande et de Lithuanie.

On s’étonne surtout que la nouvelle carte, — car il existe aussi une carte de pommes de terre dans les grandes villes. — ne donne droit qu’à 10 livres tous les,12 jours. C’est qu’une bonne partie de ces tubercules sont de qualité fourragère, bonne pour l’alimentation des bestiaux plutôt que des hommes ; c’est encore que les réquisitions, les stocks mal conservés par les communes, le refus de vente des paysans n’accélèrent pas la consommation.

A ces pommes déterre, le sel ne manquera pas ; son prix de 15 centimes le kilo est sans changement depuis la guerre. Le sucre est à peu près dans le même cas ; l’Allemagne en exportait pour 170 millions de francs, elle était très fière de cette industrie ; la surface cultivée en betteraves s’étant réduite l’an dernier d’un tiers, il en est résulté une hausse du sucre brut de 25 à 38 francs les 100 kilos, suffisante pour doubler ou tripler les dividendes distribués par certaines sucreries, mais représentant pour l’acheteur un supplément de 13 centimes seulement. Toutefois, les quantités disponibles répondent maintenant si juste aux besoins, que les Allemands ne veulent pas laisser sortir de sucre, si ce n’est en Suisse et contre compensation. La moindre spéculation les mettrait dans la gêne ; les autorités, qui la redoutent, risquent de la provoquer en recommandant aux brasseries de ne donner que deux petits morceaux de sucre par tasse de café.

Du café, l’Allemagne en avait des stocks importans au début de la guerre, comme il convient à un pays qui en introduit pour 260 millions de francs par an et dont le café au lait constitue, avec la bière, la boisson nationale. La consommation, loin de se restreindre, a augmenté, en dépit des chimistes