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Dont le troupeau s’attarde à ta douceur féconde,
Eau, ruissellement clair, limpide esprit du monde !

Baise le pied robuste et profond des palmiers.
Suis le roucoulement éperdu des ramiers ;

Mets tes perles au bout de leurs ailes mouillées. !
Pieuse, purifie, au soir, les mains souillées

De ceux qui vont prier pour les péchés d’un jour
Et rafraîchis le front des malades d’amour.

Charge de ton trésor les longues caravanes.
Effleure les seins durs des vierges musulmanes.

Lave les doigts rougis de sang ou de henna.
Sauve le blond pays que l’ombre abandonna.

O porteuse de vie et berceuse de songe,
Console du mirage et du mauvais mensonge

Les errans du désert et les cœurs altérés.
Rassemble autour des puits les passans égarés.

Quand sur ces puits viendra souffler le vent de sable,
Allah te garde, ô toi, divine et périssable !

Allah te garde, ô toi, source de volupté,
De la soif épuisante et folle de l’été !

Prunelle dont l’éclat abolit la souffrance.
Miroir où le désert mire son espérance,

Mère de l’oasis, amante des jardins,
Gloire à toi, Jaillissante ! Et puissent les destins

Te laisser à travers le beau rythme des choses
Suivre ta fraîche voie, ô Nourrice des roses !